Par Sarah Walker
On ne s’attendrait pas à ce que des études de cycle supérieur dans le domaine du règlement extrajudiciaire des conflits conduisent à une carrière au cœur du secteur bancaire mondial, mais c’est pourtant ce qui s’est passé dans le cas de Majella Walsh. Lorsqu’elle a quitté l’Irlande pour Londres afin d’obtenir sa maîtrise, elle n’avait pas encore conscience que les compétences qu’elle était en train d’acquérir sur «la manière de parvenir à un consensus grâce à la négociation et à la collaboration» deviendraient plus tard déterminantes pour sa carrière.
Aujourd’hui, Majella est cheffe de la Conformité en Europe et cheffe mondiale de la Conformité des marchés des capitaux mondiaux à la Banque Scotia. Cette fonction signifie qu’elle exerce une certaine influence sur la façon dont les gens perçoivent, abordent et comprennent le domaine de la conformité.
Majella souligne le rôle essentiel que joue la conformité dans le monde de la finance. «Selon moi, notre domaine se situe au cœur de toute organisation de services financiers : il sert de lien entre les ambitions et les réalités opérationnelles.»
Elle a développé cette vision des choses au cours de la vingtaine d’années qu’elle a passées au sein d’un organisme de réglementation ainsi que dans les secteurs de la gestion de patrimoine, de la vente au détail et des services bancaires d’investissement. Elle a également relevé des défis de taille, dont les ajustements qui ont suivi le Brexit ou les projets d’expansion sur de nouveaux marchés, comme celui de l’Asie.
Ces différentes fonctions lui ont appris que la conformité doit être intégrée tôt aux décisions d’une entreprise plutôt que d’être reléguée à la fin. De plus, elle sait désormais que la curiosité et l’apprentissage doivent toujours faire partie du quotidien d’une entreprise. En effet, ce sont des ingrédients qui permettent aux dirigeantes et dirigeants de responsabiliser leurs diverses équipes et de favoriser la collaboration globale.
Recadrer la conversation
Au lieu d’attendre que les problèmes surviennent, Majella incorpore les questions de conformité dès qu’une initiative majeure voit le jour et fait de cette fonction un véritable partenaire stratégique. Le paysage opérationnel évolue, sur le plan réglementaire, mais aussi géopolitique. La Conformité fait partie de l’équipe qui étudie ces changements et la manière dont l’organisation doit s’y adapter.
Elle conseille aux spécialistes de la conformité de commencer par redéfinir leur rôle dans les échanges professionnels. «Il faut d’abord comprendre les objectifs que cherche à atteindre l’entreprise. Ensuite, on peut examiner les défis ou les obstacles. Puis, on participe au développement d’options et de solutions de rechange qui répondent à la fois aux exigences réglementaires et aux objectifs de l’entreprise.» Nos collègues attendent non seulement une description claire de tout problème, mais aussi une rétroaction précise et sans ambiguïté sur les propositions qu’ils ou elles formulent.
Diriger par l’autonomisation
Dans le domaine de la conformité, les gestionnaires adeptes du modèle classique peuvent parfois avoir la tentation de tout contrôler ou d’approuver la moindre décision et tomber ainsi dans le piège de la microgestion. Cette approche risque toutefois d’affaiblir l’influence de leurs équipes, qui se contenteraient alors d’attendre des directives au lieu de promouvoir activement la conformité dans l’ensemble de l’entreprise.
Majella a appris cette leçon lorsqu’elle est passée de la fonction «d’experte technique gérant une petite équipe à celui de gestionnaire d’une grande équipe de personnes expérimentées».
Cette expérience lui a appris qu’un gestionnaire efficace en matière de conformité doit «considérer l’avenir, éliminer les obstacles pour son équipe, puis lâcher les rênes pour permettre à chaque personne de faire son travail efficacement et de manière autonome.» Les professionnels de la conformité qui se sentent responsabilisés et qui savent qu’on leur fait confiance deviennent naturellement de meilleurs ambassadeurs. Ces personnes appliquent alors une réflexion sur la conformité à chaque réunion, décision ou conversation stratégique.
Cette philosophie inspire Majella dans ses fonctions internationales à la Banque Scotia. Elle fait confiance à ses équipes lorsqu’elles doivent composer avec les réglementations complexes de plusieurs pays et trouver un terrain d’entente. Cette autonomisation crée un effet multiplicateur : les connaissances en conformité ne sont pas réservées à un ou une gestionnaire, mais circulent naturellement entre les membres de l’équipe, qui promeuvent ensuite la conformité dans le reste de l’entreprise.
«Je crois que l’essentiel, c’est d’avoir une équipe mondiale solide et hautement compétente qui sait mettre en pratique les règles de différents territoires et trouver des points communs avec les autres à l’échelle mondiale.»
L’influence du leadership de Majella se ressent dans l’ensemble du service de l’Exploitation globale, puisqu’elle est coprésidente du conseil sur l’inclusion du groupe Conformité globale et LCBA. Au sein de ce groupe, elle défend la cause de l’inclusion, pas uniquement parce que «c’est la chose à faire», mais aussi parce que des équipes diversifiées prennent de meilleures décisions. «De nombreuses recherches ont prouvé que, lorsqu’on donne la priorité à l’équité et qu’on la rend possible, on accroît la confiance et renforce la gouvernance. C’est un moteur d’excellence.»
Changer le secteur
L’influence de Majella dans le domaine de la conformité s’étend bien au-delà de la Banque Scotia. Elle est en effet une figure de proue dans ce domaine, puisqu’elle préside le comité consultatif sur la conformité de l’Association des banques étrangères (AFB) au Royaume-Uni. Elle tire parti de ces différents rôles pour ouvrir le dialogue sur la manière dont le secteur envisage l’avenir de la conformité.
Le contexte réglementaire actuel est en constante évolution, et se tenir au courant des changements est un processus continu. Pour Majella, la curiosité et l’apprentissage sont essentiels. Elle souligne d’ailleurs que sa principale ressource, ce sont les personnes qui l’entourent. «Au fil des ans, j’ai énormément appris aux côtés des personnes avec lesquelles j’ai travaillé : les leaders de la haute direction, ma structure hiérarchique et mes pairs. Même aujourd’hui, mon apprentissage continue.»
Pour ce qui touche l’avenir, Majella mentionne avec enthousiasme deux facteurs d’évolution, qui, selon elle, vont révolutionner le fonctionnement du domaine de la conformité : la transformation numérique et l’intégration de la science du comportement.
«Ces avancées ont un immense potentiel, qu’il s’agisse de simplifier les flux de travail ou d’améliorer la prise de décision fondée sur des données», explique-t-elle à propos du rôle de la technologie. Ayant été témoin de transformations technologiques majeures au cours de ses 20 ans de carrière, elle estime que «nous ne comprenons probablement pas encore à quel point le domaine de la conformité peut tirer profit de l’IA et d’autres outils technologiques».
La science du comportement, qui touche à l’aspect humain de cette évolution, est susceptible d’apporter d’importants changements. Cette science n’est pas nouvelle, mais ses applications pourraient avoir une portée beaucoup plus large qu’actuellement. Majella a d’ailleurs récemment obtenu un diplôme de cycle supérieur en sciences du comportement dans le cadre d’une formation destinée aux dirigeantes et dirigeants. «À la Banque Scotia, nous avons la chance d’avoir une équipe interne de la conformité qui se consacre à cette discipline, note-t-elle. Parallèlement aux avancées technologiques, il est essentiel de comprendre ce qui motive les personnes à créer des solutions profitables pour toutes et tous. Une partie du rôle de la conformité consiste à guider les gens pour qu’ils adoptent les bons comportements. Si nous comprenons leurs motivations et les raisons derrière leurs actes, nous pourrons mieux les soutenir et préserver la culture que nous voulons instaurer.»
Son message reste le même : les professionnels et professionnelles de la conformité jouent un rôle important au sein d’une organisation, et permettent à celle-ci d’atteindre ses objectifs tout en respectant les normes éthiques et réglementaires.
«Ce qui est unique dans le domaine de la conformité, c’est notre présence dans tous les secteurs de la banque : nous avons une vue d’ensemble sur les liens entre les différentes unités fonctionnelles, que d’autres ne verraient peut-être pas. C’est une position idéale pour comprendre comment relever les défis et combler les lacunes, ce qui permettra à la Banque de déployer tout son potentiel. Je me considère privilégiée d’avoir une carrière en conformité. Il s’agit d’un domaine extrêmement varié et intéressant qui m’offre de nombreuses possibilités et me permet de travailler aux côtés de personnes remarquables. J’ai hâte de voir comment ce secteur évoluera.»
Cet article a été publié pour la première fois dans Women of Influence et est republié avec permission.