Photo ci-dessus : Élévation le 18 septembre 2021 à Port Alberni, en Colombie-Britannique, d’un mât totémique créé par le sculpteur Tim Paul. Membre de la tribu Hesquiaht, il a lié son œuvre à la découverte des tombes anonymes des anciens pensionnats. (Eric Plummer/journal Ha-Shilth-Sa)

Pendant une grande partie de sa vie, Cat Nicholson s’est sentie un peu perdue. À 49 ans, elle comprend enfin pourquoi, grâce à sa fille Grace qui l’encourage à explorer ses racines autochtones. 

En juillet 2020, Grace les inscrit toutes les deux à un cours en ligne pour apprendre le Nuučaan̓uɫ, langue de la tribu Hesquiaht dont la mère biologique de Mme Nicholson fait partie. C’est l’occasion pour elles d’acquérir des connaissances autant sur la culture et l’histoire de la communauté que sur la langue. « Une fois en contact avec la communauté, j’ai réalisé que j’avais manqué toute une partie de ma vie. J’ai été cette fille perdue pendant si longtemps qui se retrouve peu à peu, mais je dois y aller doucement », déclare Mme Nicholson, une adjointe administrative des Technologies du Réseau canadien de la Banque Scotia.

Elle affirme que c’est le groupe de ressources pour les employés (GRE) Réseau Autochtones Scotia qui l’a finalement aidée à trouver une manière de faire partie de cette communauté. Mme Nicholson, qui est entrée au service de la Banque il y a trois ans, est responsable des communications du GRE en Ontario et membre d’autres comités sur la diversité et l’inclusion.

Elle commence à se découvrir à 16 ans alors qu’elle est enceinte de sa fille aujourd’hui âgée de 32 ans. C’est à ce moment-là qu’elle apprend qu’Audrey et Garfield Moyer, ses parents, l’ont adoptée lorsqu’elle était bébé, qu’ils étaient en réalité ses grands-parents paternels, et que Kenneth, son « frère », était son père biologique. C’était beaucoup pour elle, sans compter le fait que, peu de temps après que la famille a déménagé de Victoria à Toronto, elle devait accoucher et avait perdu Audrey, la seule mère qu’elle connaissait. Cette dernière était décédée des suites d’une leucémie deux ans plus tôt. 

Plus tard, M. Moyer lui révèle l’identité de sa mère biologique et lui explique comment entrer en contact avec elle. « J’apprends alors que ma mère biologique, Geraldine Amos, vient d’une réserve, une information dont j’ignorais toutes les implications », ajoute-t-elle. Mme Nicholson communique alors avec Mme Amos qui vit en Alberta. Elle finit par obtenir, pour elle-même et pour Grace, des cartes de statut de la Première Nation des Hesquiaht, une réserve isolée de 350 hectares située sur l'île de Vancouver, au nord de Tofino, et comptant 800 membres. Aujourd’hui, une seule famille y vit toute l’année, tandis que beaucoup d’autres la visitent. Les inondations de 1964 et l’éloignement du port ont poussé certains membres de la communauté à se disperser dans les villes voisines de Port Alberni et de Victoria, et d’autres à se déplacer plus loin, soit en Ontario, en Idaho et en Californie. 

Mme Nicholson avait déjà suivi le cours Acquisition des compétences culturelles sur les peuples autochtones offert par la Banque Scotia ainsi que d’autres cours à l’Université de l’Alberta et à l’Université de Toronto. Toutefois, elle ne savait toujours pas si sa famille avait été touchée par le système des pensionnats. 

   

Photo : Le voyage de soi de Cat Nicholson
la découverte a commencé quand elle avait 16 ans

En 2020, elle tisse des liens avec des membres de la Première Nation des Hesquiaht – dont certains font partie de sa famille – grâce au cours de Nuučaan̓uɫ. C’est alors qu’elle comprend mieux les horreurs des pensionnats et la façon dont elle-même et ses proches en ont été affectés. 

Parmi les nombreuses révélations, c’est l’aveu de son cousin sur son alcoolisme qui la touche lorsqu’ils font connaissance durant le cours. Ne sachant pas comment réagir, elle en parle au formateur qui lui explique que de nombreuses personnes de la communauté ayant été victimes d’abus dans les pensionnats se tournaient vers l’alcool pour oublier ce qu’ils avaient vécu. En 2020, elle tisse des liens avec des membres de la Première Nation des Hesquiaht – dont certains font partie de sa famille – grâce au cours de Nuučaan̓uɫ. C’est alors qu’elle comprend mieux les horreurs des pensionnats et la façon dont elle-même et ses proches en ont été affectés. 

Mme Nicholson est également frappée par le « mutisme » de plusieurs compagnons de classe qui comprennent le Nuučaan̓uɫ, mais qui sont incapables de le parler. Ceux-ci avaient tous fréquenté les pensionnats, et elle se souvient de la tristesse qu’elle a ressentie pour l’une des participantes. Cette dernière n’arrivait pas à oublier le souvenir des épingles de couture enfoncées dans sa langue chaque fois qu’elle parlait le Nuučaan̓uɫ à l’école.

Pendant qu’elle suit ce cours, Mme Nicholson entre de nouveau en contact avec Mme Amos. Celle-ci lui explique qu’elle a été détruite par les abus sexuels et physiques qu’elle avait subis au pensionnat, et par les coups de sa mère quand elle était petite. Elle dit l’avoir abandonnée pour lui permettre d’avoir une meilleure vie.

« Quand j’ai su pour la première fois qui était ma mère, j’étais en colère. Elle m’a eue à 18 ans, et moi j’ai eu ma fille à 16 ans. Ce n’était pas facile, mais je l’ai élevée, j’ai fait des études et j’ai eu de bons emplois », déclare Mme Nicholson.

« Maintenant, je comprends. Des cousins de mon âge et même plus jeunes sont allés dans des pensionnats. Pendant de longues années, des familles ont dû vivre la douleur liée aux coups, aux sévices et au fait d’avoir été arrachées à leurs proches. J’ai beaucoup de chance. »

Elle est heureuse que la Banque Scotia souligne la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation le 30 septembre, et elle espère pouvoir continuer à sensibiliser les gens au système des pensionnats. « Il a fallu qu’on découvre 215 corps à Kamloops pour que les médias grand public en parlent, et depuis, des centaines d’autres tombes ont été trouvées. Pourtant, c’est à peine si on aborde le sujet », ajoute-t-elle. 

La Commission de vérité et de réconciliation a estimé que 6 000 enfants ont perdu la vie dans les pensionnats. 

Il y a autre chose que Mme Nicholson apprécie vraiment : comme acte de réconciliation, elle a pu ajouter à sa signature de la Banque Scotia le mot « Merci » et le prénom n̓aaswiḥčis (se prononce « noss-weeh-chis ») qui lui a été donné par la tribu Hesquiaht et qui signifie « nouveaux départs ». « La langue des Hesquiahts a presque disparu, mais elle nous lie à nos croyances et à notre histoire grâce aux nombreuses personnes qui la redécouvrent et la parlent aujourd’hui », affirme-t-elle.

Elle explique que son cheminement pour trouver sa voix au sein de la communauté autochtone l’a inspirée à trouver une façon concrète d’aider d’autres personnes comme elle en travaillant dans le domaine de la diversité et de l’inclusion. 

Selon elle, nous ne savons jamais ce que traversent les collègues que nous côtoyons chaque jour. « Nous avons tous une histoire différente et parfois, nous devons prendre le temps d’écouter pour apprendre et faire preuve de beaucoup d’empathie », souligne-t-elle. 

L’année dernière, la Banque Scotia a annoncé un don de 600 000 $ à Indspire, le plus grand organisme de bienfaisance canadien dirigé par des Autochtones, pour les Autochtones. Le but de l’organisme est d’offrir aux jeunes Inuits, Métis et des Premières Nations un accès à des ressources financières et culturelles qui permettent de surmonter les principaux obstacles à l’éducation, y compris le réseautage, le coaching et le mentorat. Ce don était un volet de ScotiaINSPIRE, une initiative de 500 millions de dollars menée sur 10 ans par la Banque pour promouvoir la résilience économique des groupes défavorisés. La Banque Scotia s’est également engagée à doubler le nombre d’Autochtones à tous les échelons d’ici 2025.