- Malgré les signes évidents d’un ralentissement économique, le Canada et les États-Unis éviteront probablement une récession, sauf si l’incertitude et les droits de douane augmentent encore.
- Au Canada, les mesures budgétaires annoncées viendront porter la croissance cette année; il se peut même que l’État fédéral et les gouvernements provinciaux apportent un renfort considérable en annonçant leurs politiques.
- L’inflation continue de représenter un motif d’inquiétude qui limitera la capacité de la Banque du Canada et de la Réserve fédérale à soutenir l’économie en 2025. Les banques centrales devront faire preuve d’une grande vigilance pour enrayer l’inflation.
- Nous nous attendons à ce que les deux banques centrales fassent preuve d’attentisme cette année et abaissent leurs taux en 2026.
L’incertitude qui pèse sur les échanges commerciaux et sur les politiques continue de dominer les perspectives malgré un certain apaisement de la guerre tarifaire opposant la Chine et les États-Unis. Aux États-Unis, de fortes incertitudes pèsent toujours sur l’évolution des tarifs, qui continuent de s’inscrire à des niveaux punitivement élevés, sur l’orientation de la politique budgétaire, qui fait monter les taux d’intérêt à plus long terme, de même que sur l’attractivité des actifs libellés en dollars US pour les investisseurs, ce qui mène à une dévalorisation du dollar américain. Ces difficultés, qui mettent à mal les marchés partout dans le monde, continuent de plomber l’économie des pays. Les impacts continuent de se faire sentir au Canada, même si les gouvernements provinciaux et l’État fédéral souhaitent évoluer de concert dans une réforme de fond en comble qui pourrait mener à une révision à la hausse des prévisions. Même si nous pensons toujours que le Canada et les États-Unis éviteront une récession, le degré de confiance de ce pronostic n’est pas élevé. En outre, les risques inflationnistes devraient continuer de primer sur le ralentissement de la croissance pour les banquiers centraux du Canada et des États-Unis, ce qui laisse entendre que les banques centrales continueront de faire preuve d’attentisme cette année jusqu’à ce que le rendement relatif de l’économie des pays s’éclaircisse par rapport à l’inflation et jusqu’à ce qu’on dispose bien entendu de plus d’information sur les perspectives tarifaires et budgétaires.
Les droits de douane évoluent en montagnes russes depuis notre compte rendu prévisionnel d’avril. Les États-Unis et la Chine se sont entendus pour ramener les sanctions tarifaires de rétorsion à un niveau moins punitif, mais toujours dommageable. Un « pacte commercial » a été conclu avec le Royaume-Uni. Ces bonnes nouvelles tranchent sur le doublement des droits de douane sur l’acier et l’aluminium, ce qui va probablement nuire aux perspectives économiques américaines plus qu’à celles des pays exportateurs. Ces bonnes nouvelles ont aussi pour toile de fond l’escalade des tensions commerciales avec l’Europe, puisque le président Trump a brandi la menace de tarifs de 50 % sur les exportations européennes à destination des États-Unis, ce qu’il a par la suite reporté. Tout ceci pour dire que l’incertitude commerciale reste forte et que bien que nous espérions un repli de l’agression économique américaine contre les partenaires commerciaux des États-Unis, il est trop tôt pour supposer que ce sera le cas. C’est pourquoi nous continuons de supposer que les droits de douane annoncés resteront essentiellement en vigueur et que l’incertitude restera forte. Les droits de douane comme l’incertitude auront pour effet de peser sur la croissance mondiale et de perturber les chaînes logistiques.
Nous avons relevé nos prévisions pour l’économie américaine parce que le premier trimestre a été moins atomique que ce que nous avions escompté et du fait de la réduction des droits de douane. Même si les indicateurs laissent entrevoir une léthargie qui se poursuit au deuxième trimestre, les données sur les échanges commerciaux ont été distorsionées par l’anticipation et la mise en œuvre des droits de douane. C’est pourquoi nous croyons que les importations subiront une importante contraction au deuxième trimestre, ce qui accroîtra la pression sur la croissance. On évitera probablement une récession; or, tout dépend de l’évolution de la politique commerciale. Une nouvelle dégradation sur ce front pourrait facilement causer un ralentissement plus important que celui qui est attendu actuellement. Pour l’heure, nous prévoyons un taux de croissance de 1,5 % cette année, puis de 0,9 %. À ces niveaux, la croissance serait nettement inférieure au potentiel, ce qui permettra de dégager une capacité excédentaire en 2026. Cette capacité excédentaire devrait faire baisser l’inflation par rapport aux niveaux élevés observés à l’heure actuelle. La Réserve fédérale pourra ainsi, en temps voulu, abaisser son taux directeur. Nous ne pensons pas que cette éventualité se produira vraisemblablement avant 2026; or, il y a un risque que la Fed prenne les devants et baisse ses taux.
Il y a aussi encore beaucoup d’incertitudes sur les répercussions du choc tarifaire dans l’économie. Le surcroît des importations et des stocks du T1 se résorbera dans les prochains mois ou les prochains trimestres. C’est quasiment certain. Au-delà de ces délais, on ne connaît pas vraiment l’impact que les droits de douane auront sur le mécanisme de l’inflation. Les sociétés cotées en Bourse laissent entendre qu’elles augmenteront leurs prix en réaction aux droits de douane, alors que dans les enquêtes statistiques, les indicateurs des attentes inflationnistes restent très élevés, ce qui laisse entendre que le risque d’inflation est toujours aussi substantiel; c’est pourquoi nous pensons que la Fed continuera de faire preuve d’attentisme dans ses prochaines réunions.
Le désintérêt relatif des investisseurs pour les actifs américains devient de plus en plus un enjeu dans les prévisions. Les inquiétudes qui pèsent sur les plans budgétaires des États-Unis ont fait augmenter les coûts du crédit américain, ce qui s’est répercuté sur d’autres marchés. Les investisseurs remettent en cause l’exceptionnalisme américain, selon lequel les marchés boursiers des États-Unis ont surclassé pendant des années les marchés des économies avancées, ce qui amène certains gestionnaires d’actifs à réduire leurs positions aux États-Unis. Ces deux facteurs, ainsi que le malaise général provoqué par l’orientation de la politique américaine, ont donné lieu à des mouvements exceptionnels sur les marchés des devises, dans lesquels le dollar américain s’est dévalorisé malgré le choc tarifaire (qui aurait plutôt dû rehausser le dollar), et les coûts relatifs du crédit augmentent. C’est pourquoi nous nous attendons aujourd’hui à ce que le dollar américain continue de se dévaloriser en chiffres effectifs en 2026. Selon une conséquence de ce point de vue, nous entrevoyons aujourd’hui une forte valorisation du dollar canadien à terme, la paire USD/CAD atteignant 1,34 à mesure que 2025 avance.
Nos prévisions pour le Canada continuent essentiellement de cadrer avec nos attentes précédentes pour 2025, à 1,4 % environ; nous avons rehaussé à 1,1 % environ nos attentes pour 2026. La croissance du premier trimestre a été plus vigoureuse qu’attendu en raison essentiellement d’un regain des exportations, et les données laissent entendre que les échanges commerciaux commencent déjà à ralentir. Il est évident que l’économie se ralentit, et nous nous attendons aujourd’hui à une baisse de presque 1 % trimestriellement au deuxième trimestre. Ce ralentissement s’explique par le revirement des exportations, mais aussi par la torpeur du marché du logement et du secteur manufacturier. Cette torpeur continue de s’expliquer par les chocs tarifaires et par l’incertitude qu’ils suscitent. Nous ne nous attendons pas à une récession malgré le rendement escompté au T2. La baisse des impôts fédéraux des particuliers entre en vigueur le 1er juillet. Le gouvernement a déjà éliminé la TPS sur les nouveaux logements de moins de 1 million de dollars pour les primo-accédants. Le gouvernement de l’Ontario a effectivement lancé un mini-programme d’aide pour son économie. À une époque plus récente, le premier ministre Mark Carney s’est engagé à accroître nos dépenses militaires pour les porter à 2 % du PIB au cours de cet exercice financier, ce qui représente des années d’avance sur le plan. Il est évident que tout ce qui se produit dans le domaine des politiques à l’échelle fédérale comme à l’échelle provinciale pourrait hausser la croissance (et la dette) à terme. Nous attendons qu’on annonce et mette en œuvre des mesures concrètes. Pour l’heure, nous continuons de croire que la politique budgétaire représente un risque de hausse évident, et potentiellement important, pour nos prévisions de croissance, d’inflation et de taux d’intérêt.
Même si la croissance devrait rester inférieure au potentiel en 2026, ce qui veut dire que les écarts de production se creusent, la dynamique inflationniste reste inquiétante. Notre modèle fait appel à la moyenne de deux indicateurs de l’inflation sous-jacente de la Banque du Canada. Ces indicateurs s’inscrivent aux environs de 3 % sur un an au T2, soit à peu près 0,25 point de pourcentage de plus que nos précédentes prévisions. Il est improbable que l’accélération de l’inflation sous-jacente jusqu’à maintenant dans ce trimestre soit attribuable aux impacts directs des droits de douane et de nos mesures de rétorsion. Ce qui explique que la brusque hausse de l’inflation sous-jacente observée jusqu’à maintenant soit plus problématique. Les attentes inflationnistes se sont élevées pour les douze prochains mois. La croissance des salaires surpasse la productivité, et nous savons que les contraintes de l’offre représentent de nouveaux risques d’inflation. Nous nous attendons aujourd’hui à ce que l’inflation sous-jacente se ralentisse de 2,6 % d’ici la fin de 2025 et de 2,2 % avant la fin de 2026 parce que l’offre excédentaire exerce une pression à la baisse sur l’inflation; il serait toutefois insensé de croire que les risques d’inflation ne sont pas orientés à la hausse compte tenu de l’évolution récente de l’inflation même et du risque que la politique budgétaire rehausse la croissance au-delà de nos prévisions.
Comme l’a si clairement indiqué le gouverneur Tiff Macklem, le défi de la Banque du Canada dans la fixation de sa politique consiste à se demander ce qui est plus inquiétant pour la dynamique de l’inflation : la hausse de l’inflation que nous avons constatée et qui pourrait s’accentuer par rapport au ralentissement de la croissance. À l’heure actuelle, l’écart qui se creuse entre l’inflation et sa cible de 2 % reste en tête des priorités. C’est pourquoi nous ne croyons pas que la Banque du Canada baissera cette année son taux directeur. Nous espérons d’être surpris par la baisse de l’inflation, ce qui favorisera un certain assouplissement monétaire; on ne peut toutefois pas simplement compter sur cet assouplissement à ce stade. Comme nous tous, la Banque du Canada est toujours en mode de dépendance extrême vis-à-vis des données. Il est plus probable que le taux directeur soit abaissé en 2026 à l’aube de la deuxième année d’une croissance inférieure ou potentielle, et nous prévoyons effectivement des baisses de 50 points de base en 2026. À nouveau toutefois, ce résultat dépendra essentiellement de l’évolution de la guerre commerciale, de la réaction des ménages et des entreprises et des programmes d’aide déployés par l’État fédéral et des gouvernements provinciaux.
Du point de vue des provinces, nous nous attendons à ce que l’Ontario et le Québec fassent moins bien que la moyenne nationale parce qu’ils sont plus exposés aux secteurs sanctionnés par les tarifs. Dans les trois premiers mois de la guerre tarifaire, l’économie de l’Ontario a perdu près de 60 000 emplois, et le taux de chômage a bondi à près de 8 %, même si au Québec, l’emploi a été plus résilient. Les ventes de logements sont aussi plutôt léthargiques depuis février en Ontario (en baisse d’environ 25 % sur un an), puisque les ménages retardent les achats importants en raison de l’incertitude créée par la guerre commerciale — et peut-être même, dans une certaine mesure, en attendant que le congé de TPS sur les logements neufs pour les primo-accédants prenne effet à la fin de mai. Par contre, l’activité économique est restée vigoureuse dans les provinces exportatrices de pétrole, et nous nous attendons à ce que ces provinces surclassent la moyenne nationale en 2025 comme en 2026. Cependant, les nouveaux droits de douane et d’autres chocs externes potentiels pourraient influer sur cette prévision, et la forte incertitude continuera probablement de peser sur toutes les régions du pays.
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