- Les dernières prévisions publiées le 16 avril par les Études économiques de la Banque Scotia supposent que les tarifs nouvellement mis en œuvre sont permanents, ce qui cadre avec notre pratique courante qui consiste à éviter la spéculation sur les changements qui pourraient intervenir éventuellement dans les politiques, ce qui donne, pour le Canada comme pour les États-Unis, des perspectives plus léthargiques par rapport au scénario potentiel dans lequel les tarifs sont temporaires.
- Dans cette note, nous présentons un scénario différent, dans lequel les tarifs sont supprimés en septembre 2025, ce qui donne des dommages économiques nettement moindres et une baisse des pertes d’emplois par rapport à notre scénario référentiel d’avril. En 2026, le PIB gagne 1 point de pourcentage de plus dans les deux pays par rapport à un scénario de tarifs permanents, alors que le taux de chômage accuse une baisse de l’ordre de 1 point de pourcentage. Les incidences pour la politique monétaire sont différentes entre les deux pays, puisque chaque économie absorbe différemment le choc commercial.
- Une forte hausse des droits d’importation des États-Unis produit un choc sur l’offre, en haussant substantiellement l’inflation et en misant à la croissance, ce qui limite la capacité de la Réserve fédérale à réagir et ce qui a pour effet de hausser le taux directeur par rapport à un scénario sans tarifs. L’élimination rapide des tarifs ferait en sorte que l’inflation s’inverserait d’elle-même, en créant une plus grande marge de manœuvre pour l’assouplissement de la politique monétaire. Dans ce cas, le taux directeur serait moindre que dans un scénario de tarifs permanents, mais serait toujours supérieur à celui du scénario sans tarifs.
- Au Canada, le choc tarifaire produit essentiellement ses effets dans les canaux de la demande, ce qui donne à la Banque du Canada une plus grande marge de manœuvre pour réagir. Que les tarifs soient permanents ou temporaires, la politique monétaire est plus assouplie que dans un scénario sans tarifs, les tarifs temporaires réclamant un moindre assouplissement que les tarifs permanents.
Dans nos dernières prévisions officielles, publiées le 16 avril, nous supposons que les tarifs en vigueur à cette date sont permanents, ce qui correspond à notre convention qui consiste à l’intégrer dans nos prévisions que les baromètres commerciaux ont mises en œuvre, en évitant de spéculer sur les interventions éventuelles, dont la suppression de ces tarifs, compte tenu de la forte incertitude. Cette hypothèse ne représente pas nécessairement l’estimation la plus juste des Études économiques de la Banque Scotia sur ce qui se produira probablement. Nous nous trouvons dans un environnement prévisionnel exceptionnel dans lequel le niveau d’incertitude a surpassé les seuils qui permettent d’avancer des estimations, quelles qu’elles soient, sur les politiques économiques et commerciales. C’est ce qu’on constate dans la décision de la Banque du Canada de ne pas publier de prévisions dans son Rapport sur la politique monétaire d’avril, en décidant plutôt de déposer différents scénarios pour capter le large éventail de possibilités.
Dans cette note, nous présentons une analyse de la sensibilité de nos prévisions d’avril et nous proposons un autre scénario dans lequel les tarifs récemment adoptés sont temporaires et sont supprimés à la fin du troisième trimestre cette année. Dans l’ensemble, on peut s’attendre à ce que les effets négatifs des tarifs soient nettement moins prononcés dans un scénario dans lequel ils sont temporaires. Les tarifs temporaires causent moins de secousses, dans les chaînes logistiques et dans le commerce, que les tarifs permanents, ce qui réduit substantiellement le recul du PIB et la hausse du taux de chômage. Ce principe s’applique aussi bien aux États-Unis qu’au Canada, même si les autres impacts spécifiques sont différents en raison des structures économiques qui leur sont propres et de leurs fardeaux tarifaires.
Il faut se rappeler que nos prévisions d’avril tiennent compte des tarifs mis en œuvre par l’administration Trump en date du 16 avril, ce qui représente une augmentation nettement supérieure à 20 % du fardeau tarifaire effectif qui pèse sur l’économie américaine. Hormis les effets négatifs de l’incertitude correspondante sur l’humeur et les dépenses des ménages et des entreprises, ces tarifs mènent à une hausse des coûts des intrants de production, à des secousses dans les chaînes logistiques et dans le commerce international et à une mésaffectation des ressources — comparables à un choc sur l’offre, en se répercutant sur l’activité économique et en faisant augmenter l’inflation. Puisqu’ils sont permanents, ces tarifs donnent lieu à une hausse tenace de l’inflation, en réduisant le périmètre de réaction de la Réserve fédérale au fléchissement de la croissance, compte tenu du risque inflationniste. Notre modèle laisse entendre que ce scénario conduirait au relèvement du taux cible sur les fonds fédéraux par rapport aux précédentes prévisions sur des tarifs moindres ou sans tarifs. Ainsi, dans ce scénario, la Banque centrale américaine maintient à 4,50 % son taux directeur jusqu’à la fin de cette année.
Dans un autre scénario dans lequel les tarifs sont rapidement supprimés, l’inflation s’inverse d’elle-même, et les tarifs n’entraînent pas de hausses importantes des attentes inflationnistes — qui se seraient propagées à l’inflation éventuelle. Ainsi, la Réserve fédérale peut se consacrer à l’activité économique dans le cadre de son mandat et abaisser les taux d’intérêt en réaction à la léthargie de l’économie, ce qui vient amortir la chute du PIB et la hausse du taux de chômage par rapport à un scénario de tarifs permanents.
Dans le tableau 1, nous comparons les résultats prévus pour l’économie américaine dans ces deux scénarios. Alors que dans nos prévisions d’avril, nous avons projeté un ralentissement considérable, dans notre scénario de tarifs temporaires, l’économie américaine tire nettement mieux son épingle du jeu, puisqu’elle subit des pertes économiques et d’emplois moindres, que l’inflation est plus faible et que la politique monétaire s’assouplit. Dans un scénario de tarifs temporaires, l’économie américaine devrait, selon les projections, croître de 1,1 % en 2025 et de 1,6 % en 2026, par rapport à 0,9 % et 0,6 % à peine dans un scénario de tarifs permanents. Le taux de chômage culmine à 4,6 % en 2025 avant de plonger à 4,5 % en 2026, alors que dans le scénario des tarifs permanents, il se hisse à 5,5 % en 2026. Bien que cette note tienne compte de l’impact direct de la durée des tarifs, il est possible qu’une normalisation plus rapide des baromètres de l’incertitude suivant la suppression des tarifs vienne encore améliorer les résultats du PIB et du chômage par rapport à ce que nous annonçons dans cette note.
Au Canada, les tarifs imposés par les États-Unis et la Chine et intégrés dans nos prévisions d’avril donnent lieu à un fardeau tarifaire effectif de l’ordre de 4 % sur les exportations canadiennes. En réaction, les mesures de représailles du Canada ont haussé d’environ 2 % le fardeau tarifaire effectif sur les importations canadiennes, ce qui est nettement moindre que les États-Unis, pays dans lequel le choc sur les importations autoimposées est relativement décuplé et même plus. C’est pourquoi le choc tarifaire est plus prononcé sur la demande au Canada. L’incertitude, l’économie américaine plus léthargique et l’impact des interventions commerciales des États-Unis contre la Chine sur les cours des produits de base — soit les canaux traditionnels de la demande — sont les principaux facteurs qui expliquent le fléchissement des perspectives du Canada dans nos prévisions d’avril. Autrement dit, la Banque du Canada a une plus grande marge de manœuvre que les États-Unis pour réagir au recul de la production, et dans nos prévisions d’avril, nous anticipons un assouplissement en 2026, pour clore l’année à 2,00 %.
Une intervention présumée dans la politique budgétaire sert de garde-fou important contre un fléchissement des perspectives dans nos prévisions d’avril. Essentiellement, nous nous attendons à ce que le gouvernement du Canada muscle la demande dans le court terme grâce à des transferts et à des rabais sur les taxes, ce qui devrait permettre de soutenir immédiatement l’économie et d’atténuer les effets des résultats les plus défavorables. Dans le moyen terme, nous prévoyons un déploiement des investissements et des dépenses de l’État pour contrer les dommages permanents causés par les tarifs permanents et pour favoriser la restructuration nécessaire. Cette hausse des investissements de l’État pourrait compenser une partie des pertes du PIB potentiel, ce qui apporterait une plus grande marge de manœuvre pour permettre à la politique monétaire de corriger la léthargie économique.
Dans un scénario dans lequel les tarifs sont temporaires, l’économie canadienne subirait un ralentissement moins prononcé : le PIB gagnerait 1,7 % en 2025 et 1,6 % en 2026 — ce qui est supérieur aux prévisions d’avril, soit 1,6 % et 0,7 % (tableau 2). Le taux de chômage s’améliorerait aussi pour passer de 6,9 % en 2025 à 6,1 % en 2026, au lieu de s’inscrire à 7,2 % selon les projections dans un scénario de tarifs permanents. Puisque la croissance de l’économie américaine et celle de l’économie mondiale prennent du mieux, les exportations canadiennes seraient confrontées à des vents contraires moins violents, et le poids de la baisse des cours des produits de base s’amoindrirait. Nous continuons de supposer que les gouvernements apporteront une aide budgétaire à court terme grâce à des transferts et à des rabais sur les taxes pour amortir l’impact à court terme, sans toutefois que l’État augmente ses investissements lorsque l’économie tâchera d’éviter les secousses durables associées aux tarifs permanents. Si la politique monétaire continue de réagir à la léthargie portée par la demande, il est moins nécessaire de l’assouplir, et le parcours du taux directeur finit par monter plus que dans le scénario des tarifs permanents —même s’il reste inférieur à ce qu’il serait dans un environnement sans tarifs. Cette situation contraste avec les États-Unis, pays dans lequel le lourd fardeau tarifaire sur les importations s’apparente plus à un choc sur l’offre : il hausse l’inflation et entrave la politique monétaire lorsqu’il est permanent, mais permet un meilleur assouplissement lorsqu’il est temporaire. Dans ces deux scénarios, le taux directeur américain finit par être supérieur au référentiel sans tarifs.
Le résultat pourrait être encore plus positif que ce que nous supposons dans cette note si la suppression des tarifs s’accompagne d’une poussée des dépenses associées aux mesures d’aide financière. La demande refoulée se multiplie lorsque les ménages et les entreprises restreignent leurs dépenses en raison des tarifs et de l’incertitude qu’ils suscitent. Une contrepassation hâtive des tarifs pourrait déclencher un rebond plus rapide si l’incertitude se dissipe plus rapidement que ce que nous supposons dans cette analyse.
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