LE MARCHÉ CANADIEN DU LOGEMENT : L’ATTENTISME, ENCORE
RÉSUMÉ
Au Canada, les ventes de logements ont plongé de 4,1 % (en données désaisonnalisées sur un mois) en août, alors que les inscriptions ont légèrement remonté, de 0,8 %, ce qui a encore détendu le ratio des ventes par rapport aux nouvelles inscriptions, indicateur de la tension du marché, puisque les ventes se sont repliées et que les inscriptions ont préservé leurs gains des mois précédents. Le ratio, qui a baissé par rapport à son récent pic de 68,3 % en avril, s’établit aujourd’hui à 56,2 %, ce qui cadre avec sa moyenne à long terme de 55,2 % et ce qui indique que le marché national est équilibré, du moins d’après les moyennes statistiques et les écarts. Les mois de stocks ont augmenté pour s’inscrire à 3,4 mois — contre 3,2 mois en juillet; ils se situent toutefois toujours à un mois et demi environ en deçà de leur moyenne à long terme, qui est de l’ordre de cinq mois.
Malgré certaines différences régionales, les marchés locaux que nous suivons ont été plus nombreux à accuser des baisses. Par contre, on a relevé une répartition assez égale entre les marchés sur lesquels les inscriptions ont augmenté et ceux sur lesquels elles ont baissé. Les ventes ont fléchi dans 23 des 31 marchés que nous suivons, alors que les hausses sur les marchés majeurs du Nouveau‑Brunswick, de Terre‑Neuve‑et‑Labrador, de la Saskatchewan et de l’Alberta ont été éclipsées par des baisses généralisées dans d’autres provinces, surtout l’Ontario et la Colombie‑Britannique. Par ailleurs, les inscriptions ont augmenté dans 18 des 31 marchés locaux que nous suivons, ce qui a presque entièrement été masqué par les baisses dans les autres marchés. Toutefois, les hausses plus importantes des mois précédents se sont enchaînées avec un modeste relèvement des nouvelles inscriptions d’août. Ce rattrapage des inscriptions à l’heure où l’activité des ventes s’est repliée est venu détendre encore la conjoncture des marchés, et Barrie a désormais rejoint Toronto en territoire acheteur. Six des marchés que nous suivons ont été en territoire vendeur en août : tous ces marchés ont inscrit des hausses de leurs ventes en août.
Les prix, mesurés selon l’indice des prix des propriétés (IPP) MLS, ont arraché un gain de 0,4 % (en données désaisonnalisées sur un mois) en août : cette hausse mensuelle est plus modeste que celle des quatre derniers mois. Il s’agirait de la cinquième hausse mensuelle d’affilée, après plus d’une année de baisse en réaction à la hausse des taux d’intérêt et à la conjoncture économique, et de la première hausse sur un an (0,3 % sur un an) depuis septembre 2022. La hausse mensuelle d’août a été portée essentiellement par les habitations en rangée et les appartements (1 % et 0,9 % respectivement); les maisons unifamiliales ont inscrit un gain de 0,3 %. Grâce aux résultats de ce mois, l’IPP MLS continue de décrocher des niveaux atteints avant la pandémie et s’établit aujourd’hui à 40 % de plus, ce qui lui permet de rattraper une partie de la baisse des prix que nous avons constatée pendant la correction. Après avoir culminé en février 2022, les prix ont fléchi sur 12 mois, pour atteindre un creux en mars 2023, à 15 % de moins que les niveaux du pic. On a décrit comme une correction, par rapport aux pics intenables et inabordables, la période comprise entre février 2022 et mars 2023. Grâce aux hausses des derniers mois, les prix se situent aujourd’hui à 9 % seulement en deçà du pic de février 2022.
CONSÉQUENCES
Dans l’ensemble du pays, les ventes de logements ont dérapé en août. Elles se sont ralenties dans les derniers mois par rapport au début de l’année, qui a été caractérisé par une recrudescence de la remontée, portée essentiellement par la conviction généralisée, à l’époque, que la Banque du Canada avait dénoué son cycle de durcissement et qu’elle s’apprêtait à baisser les taux. La BdC a par la suite entre autres enchaîné deux hausses de taux durant l’été et a durci son discours sur l’évolution des taux directeurs.
Voici quelques réflexions sur la baisse relativement importante d’août. Premièrement, il s’agit du premier mois complet après la hausse de juillet qui a suivi la hausse de juin. Certes, il s’agit d’une hausse d’à peine 25 points de base dans chaque cas, ce qui, à la rigueur, ne serait guère important dans un marché qui a déjà écarté de nombreux acheteurs potentiels à cause des prix. Or, il se pourrait que l’impact des hausses consécutives ait été décalé, puisque certains taux hypothécaires établis d’après les anciens taux d’intérêt intérieurs sont arrivés à expiration, de sorte que l’impact est plus évident dans les statistiques d’août. En outre, et comme nous l’avons vu dans les précédents rapports, l’effet d’incertitude créé par les interventions de la BdC continue d’être le facteur le plus probable qui explique le ralentissement de l’activité. Nous sommes à nouveau en territoire attentiste : les acheteurs attendent plus d’information et de certitude sur l’évolution future des taux, de l’inflation et de l’activité économique. Y aura‑t‑il d’autres hausses de taux? Les baisses de taux seront‑elles plus hâtives? Perdrai‑je mon emploi? Les prix des logements suivront‑ils le ralentissement des ventes? Ces interrogations font partie des nombreuses incertitudes qui expliquent qu’à l’heure actuelle, les achats potentiels restent en veilleuse.
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