Shaun Osborne
Stratège cambiste en chef
Stratégie des marchés des changes
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Le dollar américain (US) est appelé à finir l’année en force, comme en témoigne l’apaisement des tensions commerciales d’une part et, d’autre part, la résilience tendancielle de la croissance qui a tempéré les attentes vis-à-vis des baisses de taux de la Réserve fédérale (Fed). La longue paralysie budgétaire de l’État fédéral a privé les marchés de données essentielles sur la situation de l’économie américaine, ce qui est venu renforcer le dollar US en octobre selon le principe voulant que l’absence de nouvelles soit une bonne nouvelle.
Nous adaptons aujourd’hui à la conjoncture des marchés certaines de nos prévisions à court terme, à l’approche de la fin de l’année, en modérant nos attentes vis-à-vis de la léthargie du dollar US dans les prochains trimestres en réaction à l’évolution récente de la conjoncture. Or, notre scénario de base veut toujours que le dollar US fléchisse dans la prochaine année et en 2027 — pour plusieurs raisons. Si les tendances de la croissance paraissent se maintenir, les perspectives restent incertaines, et certaines tendances dans les principaux rapports statistiques (comme ceux de la série de l’ISM) sont toujours aussi anémiques. Le secrétaire du Trésor Scott Bessent est même allé jusqu’à laisser entendre que certains secteurs de l’économie américaine sont en récession. L’attention portée aux risques de crédit, la léthargie tendancielle du marché du logement et l’inconstance des dépenses des consommateurs pourraient aviver les inquiétudes à propos des perspectives. Les ambitieuses valorisations boursières constituent elles aussi un motif d’inquiétude, puisqu’un recul important des actifs à risque pourrait intensifier les vents contraires qui soufflent sur l’économie comme on peut le constater dans les enquêtes sur la confiance et la consommation.
Nous avons bon espoir que le taux directeur de la Fed connaîtra une baisse soutenue dans la prochaine année malgré les signaux contradictoires sur l’économie américaine au moment d’écrire ces lignes. Dans leurs prévisions, les Études économiques de la Banque Scotia s’attendent à des baisses de 100 points de base dans la prochaine année, et selon ces prévisions, la Fed maintiendra ensuite à 3,00 %, pour l’avenir prévisible, son taux directeur cible. Au moment de rédiger cette note, les marchés intègrent environ 16 points de base pour la baisse du risque d’ici la fin de cette année et un peu plus de 80 points de base de baisse au total jusqu’à la fin de 2026.
Les paramètres de la politique d’assouplissement de la Fed tranchent sur la stabilité ou le léger durcissement de la politique monétaire de nombreuses autres grandes administrations monétaires dans la prochaine année, ce qui comprime l’avantage du rendement du dollar US. Nous continuons de prévoir un certain ralentissement de la croissance de l’économie américaine et nous restons conscients des importantes difficultés structurelles du dollar US, ce qui s’explique essentiellement par les vertigineux déficits du budget et des comptes courants qui devraient se creuser aux États-Unis dans les prochaines années. La baisse des rendements du dollar US aura pour effet d’amoindrir les frais de couverture, ce qui pourrait permettre de mieux maîtriser l’exposition des investisseurs étrangers au dollar US, en augmentant la pression baissière qui s’exercera sur le billet vert.
Bien qu’il soit encore très tôt dans le processus, peu de statistiques laissent entendre que les politiques douanières du président Trump ont beaucoup d’impact sur le déséquilibre commercial des États-Unis ou ravivent plus singulièrement la relocalisation de l’activité manufacturière aux États-Unis. La léthargie du dollar US continue de représenter un levier potentiel pour étayer les objectifs commerciaux du président américain.
Il faut signaler qu’il ne faudrait pas faire peu de cas des bonnes nouvelles potentielles sur le dollar US. Essentiellement, la croissance de l’économie américaine reste résiliente. Les modèles de pistage du PIB de la Fed de St. Louis et de la Fed d’Atlanta laissent entendre que la croissance de l’économie au T3 a peut-être repris un peu de mieux par rapport au rythme de 3,8 % (en données désaisonnalisées et annualisées) constaté au T2. L’incertitude qui règne sur la conjoncture économique américaine, exacerbée dans une certaine mesure par l’absence de statistiques sur l’économie de ce pays, a donné lieu à un clivage exceptionnellement vaste et public parmi les décideurs monétaires américains à propos des perspectives des taux. À cet égard, l’incertitude pourrait perdurer, en étayant le dollar US dans le court terme. Des considérations saisonnières sont aussi favorables au dollar US au T4 — jusqu’à ce qu’on se rapproche de la fin de l’année : les gains de fin d’année du dollar US auront alors tendance à se corriger dans une certaine mesure.
Le dollar canadien (CA) a été tiré à la baisse à la fois par un nouveau creusement des différentiels de taux à court terme entre les États-Unis et le Canada, par l’incertitude commerciale chronique et par un pic de la volatilité des marchés au début de novembre. La baisse des taux de la Banque du Canada (BdC) en octobre est, à notre avis, la dernière du cycle. Le taux directeur se situe dans le bas de la fourchette neutre, et les décideurs ont fait clairement savoir que les baisses de taux ne peuvent guère faire mieux pour aider l’économie à s’adapter aux difficultés (commerciales) structurelles.
L’assouplissement de la politique monétaire et l’important programme de relance prévu dans le budget fédéral permettront de soutenir la croissance de l’économie canadienne. Les différentiels de taux d’intérêt entre les États-Unis et le Canada devraient se rapprocher substantiellement en 2026 lorsque la Fed baissera à nouveau ses taux et lorsque la BdC durcira, comme nous nous y attendons, sa politique monétaire à la fin de l’année, ce qui devrait porter le dollar CA. Selon nos prévisions, l’écart des taux directeurs devrait se rapprocher significativement en 2027. Nous avons rajusté à 1,33 nos prévisions pour la paire USD/CAD à la fin de 2026 et nous avons fixé à 1,30 nos prévisions pour la fin de 2027. Nos prévisions macroéconomiques (surtout sur la politique monétaire) étayent les perspectives d’un raffermissement du dollar CA à moyen et à plus long termes. Nous devons toutefois reconnaître que les risques de la politique commerciale représentent manifestement un danger actuel pour le dollar CA et le peso mexicain (MXN) dans la prochaine année.
L’Euro (EUR) s’est stabilisé après s’être replié en milieu d’année en raison de l’incertitude politique qui pèse sur la France et de la médiocrité des données économiques. La diversification des actifs sur les marchés boursiers de la zone euro qui ont porté l’EUR au S1 semble s’être amoindrie au S2. Nous nous attendons à ce que l’EUR reprenne ses gains en 2026, grâce à une croissance modérée et à la stabilité de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE). La livre sterling (GBP) reste relativement « bon marché » d’un point de vue à plus long terme, à notre avis, et même si nous nous attendons à un nouvel assouplissement de la Banque d’Angleterre (BoE) en 2026, les marchés intègrent déjà une certaine baisse des taux, et le taux directeur du Royaume-Uni devrait rester légèrement supérieur au taux cible des fonds fédéraux. La livre sterling (GBP) devrait quand même pouvoir progresser malgré la léthargie généralisée du dollar US. La Banque du Japon (BoJ) est la seule grande banque centrale qui est appelée, d’après nos prévisions, à durcir son taux directeur dans la prochaine année. Le yen japonais (JPY) reste très anémique, et les gouvernants du Trésor américain ont expressément encouragé le gouvernement du Japon à autoriser la BoJ à faire appel à sa « marge de manœuvre monétaire » pour rajuster les paramètres des taux. Les gouvernants du Japon ont récemment relevé d’un cran leurs interventions verbales pour soutenir leur monnaie. Nos prévisions pour le JPY ont été loin du compte pour cette année; or, nous nous attendons toujours à des gains modérés pour le JPY en 2026.
L’apaisement des inquiétudes commerciales a permis aux monnaies des pays de l’Amérique latine de garder le cap ou de se raffermir légèrement depuis le milieu de l’année, alors que les opérations de portage attrayantes ont permis au peso colombien (COP) de surperformer. Le peso chilien (CLP) est toutefois loin d’être performant, en raison de la forte volatilité du cuivre et de la prudence des investisseurs en prévision de l’élection générale de la mi-novembre. Nous prévoyons généralement des tendances stables ou légèrement baissières pour les monnaies régionales dans la prochaine année; or, les inquiétudes à propos des risques de queue négatifs pourraient perdurer en raison des problèmes de sécurité et des difficultés économiques.
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