- Le taux directeur a été mis en veilleuse comme prévu.
- La BdC continue de prévenir que les taux pourraient augmenter au besoin.
- Or, le reste de sa déclaration indique qu’elle n’y croit pas vraiment.
- La conjoncture financière s’est donc apaisée.
- Le dollar CA demeure un point faible.
- L’évolution de la conjoncture remettra en cause la décision prise aujourd’hui par la BdC.
- Taux à un jour de la BdC, en % :
- Données réelles : 4,5
- Scotia : 4,5
- Consensus : 4,5
- Auparavant : 4,5
La Banque du Canada n’a pas changé son taux directeur, à 4,5 %, comme tous, y compris les Études économiques de la Banque Scotia, s’y attendaient.
Ce parti pris pourrait constituer, dans l’ensemble, une question différente. À l’heure où la Fed envisage un potentiel de durcissement, selon les données, la Banque du Canada a fait un pas dans l’autre sens dans sa déclaration de cet avant‑midi.
Par conséquent, la conjoncture financière s’est légèrement apaisée, grâce à la remontée des taux canadiens à court terme, alors que le rendement des obligations du gouvernement du Canada à 2 ans a évolué à la baisse, et que le rendement des bons du Trésor américain à 2 ans a augmenté dans la journée. Le dollar CA s’est déprécié alors que dans la foulée, la paire USD/CAD s’est rapprochée de 1,39. Ce chiffre correspondrait au niveau qui a déclenché, en octobre dernier, la mise en garde de Tiff Macklem, qui prévenait que les taux devraient compenser. Veuillez consulter les mouvements intraséance dans le graphique 1.

La dépréciation du dollar CA aurait été encore plus forte si le président Jerome Powell n’avait pas tenu en laisse la remontée d’hier et le dégagement des taux américains à plus court terme en précisant, dans son témoignage devant la Chambre cet avant‑midi, qu’« aucune décision n’a été prise », puisque la Fed surveille les prochains rapports comme la masse salariale et l’IPC. Cette précision était claire dans les conditions qu’il a exprimées pour les pronostics à terme d’hier; or, je crois que les marchés devaient l’entendre plus clairement. Si ces rapports américains sont largement au rendez‑vous des attentes, le dollar CA pourrait être encore plus vulnérable lorsque les chiffres sortiront en partie sur les mises de la Fed et en partie sur l’interprétation de la déclaration faite aujourd’hui par la BdC.
Dans l’ensemble, je crois que la BdC est vulnérable à terme et qu’elle positionne à la hausse le risque de hausse du taux directeur. Pour en expliquer les raisons, il faut se livrer à l’analyse des principaux changements apportés à la déclaration, en commençant par les signaux de durcissement des taux, puis par la façon dont elle recule sur ces signaux.
PRÊTE À D’AUTRES HAUSSES, MAIS PAS VRAIMENT
La BdC a répété sa ligne de conduite selon laquelle elle « se tient prêt[e] à relever encore le taux directeur si cela est nécessaire pour ramener l’inflation à la cible de 2 % ». Le problème, c’est que dans le reste de la déclaration, elle indique qu’elle n’y croit pas vraiment, mais qu’elle pense peut‑être qu’elle devait s’avancer sur un autre apaisement prématuré de la conjoncture financière. Le reste de la déclaration vient édulcorer cet engagement.
ELLE SE REND BIEN COMPTE DES FORCES EXTERNES
Dans sa déclaration, elle a effectivement affirmé qu’à son avis, les perspectives de croissance et d’inflation aux États‑Unis et en Europe « sont relativement plus élevées qu’attendu » dans le RPM de janvier. Elle enchaîne en déclarant que « … les marchés du travail sont appelés à rester étendus, et l’inflation fondamentale reste exacerbée ». Les autres allusions externes ne sont pas modifiées, et la Banque continue de faire état du risque de hausse pour les cours des produits de base en raison du rebond de la Chine et de la guerre en Ukraine.
VOIR PLUS LOIN QUE LE PIB DU T4
La BdC a effectivement reconnu, ce qui est de bon augure, que le PIB du T4 n’avait pas été aussi léthargique sous le capot que ce qu’indiquaient les données de synthèse, ce qui est encourageant, puisque si elle ne l’avait pas fait, elle aurait télégraphié une inquiétude plus vive et une plus grande conciliation. Voici ce qu’elle a déclaré :
« Au Canada, la croissance économique a été nulle au quatrième trimestre de 2022, soit inférieure à la projection de la Banque. Avec la consommation, les dépenses publiques et les exportations nettes toutes en hausse, le produit intérieur brut plus faible qu’anticipé s’explique en grande partie par un ralentissement substantiel des investissements en stocks. »
Cette déclaration cadre avec mon analyse des chiffres. Elle aurait toutefois pu faire un pas de plus et noter la liste des distorsions temporaires du PIB de décembre, ce qui est devenu une mauvaise nouvelle puisqu’il n’y avait pas encore eu de déversement de pétrole qui a fermé les robinets pétroliers du Canada, deux déraillements de train et les sautes d’humeur météorologiques plus brusques que d’habitude, le mois se serait soldé par de très bonnes nouvelles; or, elle a décidé de ne pas le faire ou a négligé de le faire.
LA VIGUEUR DES MARCHÉS DU TRAVAIL INTÉRIEURS
Dans sa déclaration, la BdC fait observer que les marchés du travail restent « très tendu[s] » et que la croissance de l’emploi s’est déroulée « avec une force surprenante ». Elle rappelle la croissance des salaires à 4 %‑5 % en chiffres sur un an et précise que « la productivité a baissé ces derniers trimestres ». On peut aussi dire qu’elle a relativement durci le ton.
LA DEMANDE EXCÉDENTAIRE : DÉJÀ DE L’HISTOIRE ANCIENNE?
Pour ce qui est du recul conciliatoire, il faut d’abord dire qu’elle a subitement cru qu’après un rapport sur le PIB, l’économie canadienne avait balayé la demande excédentaire. C’est ce que nous pouvons constater par omission, puisqu’elle a biffé, dans la déclaration précédente, deux mentions selon lesquelles l’économie reste en territoire de demande excédentaire. S’il s’agit d’un oubli, on peut dire que c’est un oubli de taille, et je n’y crois pas. Nous verrons bien si elle se méprend sur le PIB potentiel et si elle mettra à jour les estimations du taux neutre.
MÊME PAS UN MOT SUR UN REBOND PROBABLE AU T1
Deuxièmement, il se peut que la BdC attende le RPM d’avril avant de livrer son pronostic sur le PIB du T1. Or, ce qui m’inquiète, c’est le commentaire selon lequel elle s’attend à « la faible croissance… dans les prochains trimestres ». En définitive, c’est possible; or, si elle inclut le T1 dans « les prochains trimestres », il se pourrait que ce ne soit pas approprié.
Je crois en effet que le PIB du T1 pourrait rebondir beaucoup plus rapidement que la prévision de croissance de 0,5 % sur un trimestre en données désaisonnalisées et annualisées par rapport au RPM de janvier, après avoir déçu au T4 : à l’époque, il avait été en berne, alors qu’on avait prévu qu’il s’inscrive à 1,3 %. Il se peut qu’elle doive oublier une partie de la déception du T4 en misant sur un PIB plus solide au T1. Les chiffres de cet avant‑midi sur la balance commerciale permettent de pister une solide augmentation nette du point de vue du PIB du T1. L’inversion des effets temporaires sur le PIB de décembre pourrait étayer ce rebond. Le poids des stocks sur la croissance du PIB, qui n’a pas été aussi lourd depuis plus de 40 ans, pourrait aussi stabiliser la croissance ou l’augmenter en chiffres nets au T1.
Malheureusement, elle n’a même pas parlé de l’évolution du T1. Je crois qu’elle est sans doute vulnérable à une surprise à la hausse, ce qui pourrait aussi vouloir dire qu’il est très improbable que l’économie ne soit plus en situation de demande excédentaire, et qu’un rebond du PIB au T1 ferait en sorte qu’il serait encore plus curieux de biffer ces mentions.
LE POUVOIR DE TARIFICATION EST-IL APPELÉ À BAISSER?
Troisièmement, elle indique qu’elle s’attend à ce que le pouvoir de tarification diminue. C’est ce que permet de constater la remarque suivante :
« Compte tenu de la faible croissance attendue dans les prochains trimestres, les pressions sur les marchés de produits et du travail devraient s’alléger. Cela devrait modérer la croissance des salaires et aussi accroître les pressions concurrentielles, rendant plus difficile pour les entreprises de répercuter leurs hausses de coûts sur les prix à la consommation. »
Si le PIB rebondit au T1, que le marché de l’emploi est toujours aussi vigoureux et que la productivité est toujours aussi exécrable, il se peut qu’il soit prématuré de plaider pour l’évolution soutenue des pressions inflationnistes fondamentales, qui se rapprochent de la cible de synthèse de 2 %.
RIEN N’INDIQUE QU’ELLE SE SOUCIE DU DOLLAR CA
Ce qui vient conforter encore cet argument, c’est qu’apparemment, le dollar CA n’est pas encore assez inquiétant pour la BdC. Nous verrons bien ce qu’en dira demain la première sous-gouverneure Carolyn Rogers, si jamais elle ose se prononcer. Sur la question, elle s’est contentée de biffer la mention selon laquelle le dollar CA « a été relativement stable par rapport au dollar US » et de remplacer cette mention par « … le dollar américain s’est raffermi ».
Si la Fed s’apprête à hausser les taux à 6 % et que la BdC se fait plus conciliante à la limite, il faut s’attendre à ce que le dollar CA atteigne 1,40. Cette évolution remettra en cause l’affirmation de la BdC selon laquelle il sera plus difficile de répercuter les pressions qui s’exercent sur les coûts. Je crois qu’elle a fait un faux pas dans ce cas et qu’elle est une cible facile pour les courtiers en devises.
ELLE SOUSCRIT TOUJOURS AU CANULAR DES EFFETS DE BASE
La BdC affirme qu’il faut s’attendre à un taux d’inflation de 3 % d’ici le milieu de l’année. Elle n’a pas tiré de leçon de trop miser sur les distorsions des effets de base. C’est ce qui l’a trompée en 2021 quand elle a écarté les risques d’inflation en l’attribuant à la léthargie de l’année précédente, sans plus. Et voilà qu’aujourd’hui, elle insiste pour dire que les effets de base d’il y a un an tireront l’inflation à la baisse.
« Ces deux chiffres devront encore diminuer, tout comme les attentes d’inflation à court terme, pour que l’inflation retourne à la cible de 2 %. »
CONCLUSION
Selon toute vraisemblance, la BdC continue probablement de croire que les grands risques pèsent sur l’inflation des services, sur la productivité et sur la croissance des salaires, comme l’a précisé le gouverneur Tiff Macklem dans son récent discours à Québec. Les indications qui le confirment dans les déclarations ne sont pas vraiment nombreuses; or, ce sont des tournures assez curieuses pour m’amener à croire que ce feuilleton n’est pas encore terminé. Il semble que les marchés continuent de s’entendre pour continuer d’intégrer d’ici l’été une hausse de taux complète d’un quart de point. Si la BdC recommence à hausser les taux, elle ne se contentera pas d’un quart de point à mon avis. Or, elle reste prudente en hésitant entre les options binaires qui consistent à ne pas augmenter les taux et de nouvelles hausses de 50 à 75 points de base.
Nous invitons le lecteur à consulter ci‑joint la comparaison des déclarations.

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