Myles Zyblock, stratège principal en placements de Gestion mondiale d’actifs Scotia — qui gère plus de 200 milliards de dollars* pour des millions d’investisseurs au Canada et ailleurs dans le monde — livre ses plus récentes réflexions sur les marchés et sur les placements.

Dans cette chronique mensuelle, Myles Zyblock explique que les hausses de taux de la Banque du Canada ont freiné le marché immobilier et se penche sur les perspectives d’ici la fin de 2023.


L’une des conséquences voulues des ambitieuses hausses de taux de la Banque du Canada a été de freiner l’économie pour mâter la flambée de l’inflation. D’après le plus récent rapport sur l’Indice des prix à la consommation (IPC), qui permet de mesurer l’inflation, il semble que la banque centrale ait réussi (puisque le taux d’inflation de mars a plongé à 4,3 % contre 8,1 % en juin l’an dernier).

Or, les interventions de la Banque du Canada ont une rançon économique. Le marché du logement a été pénalisé : les ventes comme les prix ont accusé de fortes baisses. En outre, dans la construction, l’activité s’est ralentie et menace la vigueur de l’économie : les économistes s’entendent aujourd’hui pour annoncer une récession technique (soit deux trimestres consécutifs de croissance économique négative) en 2023.

À une époque plus récente, le Bureau du surintendant des institutions financières (le « BSIF ») affirmait dans son rapport annuel que le marché du logement constituait le plus grand risque pour le système financier. On s’inquiète surtout du potentiel de défauts de paiement en réaction à la brusque hausse des taux d’intérêt.

Prophétie de malheur? En définitive, si on peut éviter cette récession ou si elle est suffisamment superficielle et que le marché du travail réussit à rester résilient, les risques qui pèsent sur le secteur du logement devraient commencer à s’apaiser. À l’heure actuelle, certains indicateurs des prix du logement donnent des signes prometteurs pour le dernier semestre de 2023. 

Le secteur du logement pèse sur les perspectives économiques

La hausse fulgurante des taux d’intérêt a ralenti l’activité dans le secteur de la construction. Les nouveaux permis accusent une baisse, ce qui a fait plonger les mises en chantier de logements réelles. Pour le mois de mars, les mises en chantier de logements ont reculé de 11 % et accusent une baisse de 12,5 % par rapport aux niveaux d’il y un an. Ces très récentes données pourraient avoir des répercussions négatives sur la série des investissements résidentiels du PIB.

Les revenus des ménages canadiens n’ont pas suivi le rythme des prix du logement

Le rythme auquel les prix du logement ont augmenté par rapport aux revenus disponibles au Canada, surtout quand on les compare à nos voisins du Sud, a accentué les vents contraires qui soufflent sur le secteur du logement.

Les prix du logement au Canada ont progressé de 3 % contre 1,4 % pour les revenus disponibles, ce qui représente plus du double de ce rythme, après correction pour tenir compte de l’inflation. 

Les hausses de taux d’intérêt pénalisent les ménages

Le BSIF a fait savoir que le marché du logement constitue un risque financier prépondérant, qui pourrait mener à des faillites. La hausse fulgurante des taux d’intérêt au Canada s’est répercutée sur les ménages en raison de l’augmentation des coûts du crédit. Par exemple, le ratio du remboursement de la dette hypothécaire a culminé de concert avec les hausses de taux d’intérêt des banques.

En définitive, la capacité des ménages à rembourser leur emprunt hypothécaire est liée à leur emploi. La proportion des hypothèques résidentielles en arrérages s’inscrit à un creux, et il est improbable qu’elle augmente sans un ralentissement de l’économie et des niveaux d’emploi. À ce point de jonction, le marché du travail repose toujours sur de solides assises.

Quel sera l’impact sur les banques canadiennes?

Si le BSIF a tiré la sonnette d’alarme sur le marché du logement, les banques cotées au TSX ont offert un piètre rendement cette année et font partie des plus mauvais élèves, avec les sociétés d’énergie. Il y a un lien de décalage avancé entre l’état de santé des banques et l’économie, qui suit probablement la trajectoire de croissance des banques.

Il y a toutefois une bonne nouvelle : les indicateurs avancés du marché du logement laissent entrevoir un rebond des titres boursiers des banques.

L’horizon du secteur du logement est-il en train de s’éclaircir?

Si le niveau d’incertitude qui plane sur le secteur du logement reste élevé, les perspectives pourraient être radieuses. La Banque du Canada prend effectivement une pause dans son cycle de durcissement des taux, ce qui est bon signe. Le marché à terme des titres à revenu fixe table sur une baisse de taux d’ici la fin de l’année. 

Le ratio des ventes par rapport aux nouvelles inscriptions, indicateur de la demande par rapport à l’offre, est lui aussi bon signe pour des villes comme Toronto et Vancouver. L’augmentation de ce ratio laisse entrevoir une reprise potentielle pour le deuxième semestre de 2023. 

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Myles Zyblock est un éminent stratège nord-américain, réputé pour ses réflexions sur les placements, qui font appel à la finance et à la psychologie pour capter les points d’inflexion majeurs sur les marchés financiers. Il a plus de 25 années d’expérience dans l’encadrement et les conseils sur la répartition des actifs pour un ensemble varié de conseillers auprès des institutions et des particuliers dans le monde entier. Il est entré au service de l’entreprise en 2013 comme stratège principal en placements et travaille en étroite collaboration avec l’équipe de gestionnaires des placements. Son expérience s’étend à différentes catégories d’actifs et régions géographiques.