CANADA : DANS L’ANTICIPATION DES RISQUES TARIFAIRES POTENTIELS

En mars, les ventes d’automobiles au Canada ont crû de 7,3 % sur un mois pour se chiffrer à 1,98 million d’exemplaires en rythme désaisonnalisé et annualisé, selon Wards Automotive (graphique 1). Ce rebond des ventes d’automobiles, de concert avec les révisions à la hausse de plus de 9 % apportées aux données pour janvier et février respectivement, s’est soldé par un gain de 1,8 % sur un trimestre pour le T1. En chiffres non désaisonnalisés, les ventes du premier trimestre ont gagné 4,3 % sur un an et ont augmenté de 3,6 % sur le même trimestre de 2019.

Graphique 1 : Les ventes de véhicules légers au Canada

Le solide début d’année pour les ventes d’automobiles pourrait s’expliquer au moins en partie par les ventes réalisées auprès des consommateurs, sans doute motivés par l’anticipation de la tourmente tarifaire, dont la rafale de surtaxes de mars. Les États-Unis avaient menacé d’imposer des surtaxes depuis la fin de janvier sur certains biens canadiens importés, certaines surtaxes devaient entrer en vigueur au début de mars, et on a annoncé le 26 mars que de nouvelles surtaxes cibleraient directement le secteur de l’automobile.

Les États-Unis ont imposé des tarifs de 25 % sur les automobiles importées, en consentant un traitement tarifaire de faveur aux véhicules conformes à l’ACEUM, et prévoient d’étendre ces tarifs aux pièces automobiles lorsqu’on aura institué un processus pour appliquer ces tarifs exclusivement à la valeur des pièces fabriquées ailleurs qu’aux États-Unis. Dans le même temps, le Canada a riposté en imposant des tarifs de 25 % sur les véhicules non conformes à l’ACEUM et importés au Canada depuis les États-Unis, ainsi que des tarifs de 25 % sur les pièces fabriquées ailleurs qu’au Canada et au Mexique des véhicules conformes à l’ACEUM et importés depuis les États-Unis. Bien que les représailles annoncées par le Canada le 3 avril ne visent pas les pièces automobiles et que les États-Unis aient décrété une pause de 90 jours dans leurs sanctions tarifaires de rétorsion pour la plupart des pays, dans l’ensemble, les coûts des mesures adoptées jusqu’à maintenant et l’incertitude qui plane sur la désescalade du conflit tarifaire auront probablement des effets durables, puisque certaines entreprises ont annoncé des changements dans leurs plans de recrutement et de production en attendant des précisions.

Nos prévisions pour les ventes de véhicules légers canadiens, soit 1,84 million d’exemplaires en 2025 et 1,83 million en 2026, risquent probablement de baisser, notamment dans les années ultérieures, en raison des faits nouveaux et des pressions qu’exercera l’escalade tarifaire sur le secteur automobile et sur l’ensemble de l’activité économique.

ÉTATS-UNIS : UN REBOND DES VENTES DE MARS EN RAISON DES TARIFS ANTICIPÉS?

En mars, les ventes d’automobiles aux États-Unis ont progressé de 11 % sur un mois en rythme désaisonnalisé pour s’établir à 17,8 millions d’exemplaires en rythme annualisé (graphique 2). Au T1, les ventes de véhicules légers se sont inscrites à une moyenne de 16,4 millions d’exemplaires (en rythme désaisonnalisé et annualisé), soit une baisse de ‑0,8 % sur un trimestre (en données désaisonnalisées). En rythme non désaisonnalisé, les ventes d’automobiles pour le premier trimestre ont gagné 4,8 % sur un an, soit le meilleur départ dans le premier trimestre des années écoulées depuis le premier trimestre de 2019, et ‑1,9 % par rapport à ce trimestre.

Graphique 2 : Les ventes de véhicules légers aux États-Unis

Il se pourrait que si les ventes d’automobiles ont été solides en mars, ce soit parce que les consommateurs ont anticipé les effets des tarifs qui viendraient augmenter le coût des véhicules importés. Les États-Unis ont imposé des tarifs de 10 % à presque tous leurs partenaires commerciaux, et différentes sanctions tarifaires de rétorsion ont été mises en veilleuse pendant 90 jours. Ces tarifs prévoient quelques exceptions, qui dépendent de divers facteurs, par exemple dans le cas des biens qui sont conformes à l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM). Si la politique commerciale reste assez volatile, les tarifs imposés depuis le début de l’année viennent augmenter considérablement le prix de différents biens intermédiaires et finaux importés aux États-Unis, dont les automobiles. Dans son analyse, le Groupe économique Anderson estime que les tarifs annoncés le 2 avril pourraient augmenter de 2 500 $ à 5 000 $ le coût des véhicules importés soumis aux tarifs les moins élevés, et à hauteur de 20 000 $ le coût de certains modèles importés.

Nos prévisions pour les ventes d’automobiles aux États-Unis, soit 16,2 millions d’exemplaires en 2025 et 16,5 millions en 2026, seront probablement révisées à la baisse puisque les tarifs imposés par les États-Unis sur les importations, notamment les automobiles exportées du Canada et du Mexique et qui ne sont pas conformes à l’ACEUM et les automobiles exportées par d’autres partenaires commerciaux, pèseront sur la demande et sur les perspectives économiques.

VENTES MONDIALES D’AUTOMOBILES : LE REBOND DE FÉVRIER EST ESSENTIELLEMENT GÉNÉRALISÉ À L’ÉCHELLE RÉGIONALE

En février, les ventes mondiales d’automobiles se sont envolées de 8,6 % sur un mois (en rythme désaisonnalisé) (graphique 3). Le rebond des ventes a été généralisé à l’échelle régionale et représente la première hausse désaisonnalisée depuis novembre 2024. En Europe de l’Ouest, les ventes d’automobiles ont augmenté pour un troisième mois consécutif, de +1,1 % sur un mois (en rythme désaisonnalisé) en février; toutefois, la cadence de cette progression s’est calmée depuis la fin du T3 de 2024. En Europe de l’Est, les ventes d’automobiles ont plongé pour la troisième fois dans les quatre derniers mois, en perdant ‑6,6 % sur un mois (en rythme désaisonnalisé) en février, dans la foulée d’une tendance de léthargie des ventes dans la région. En Asie‑Pacifique, les ventes d’automobiles ont rebondi de 15,6 % sur un mois (en rythme désaisonnalisé) en février, essentiellement grâce à la progression de 22,3 % sur un mois (en rythme désaisonnalisé) comptabilisée en Chine, le marché le plus important de la région, après avoir reculé dans les deux mois précédents. En Amérique latine, les ventes d’automobiles n’ont essentiellement pas bougé en février (‑0,2 % sur un mois, en rythme désaisonnalisé), à l’heure où la cadence des ventes reprend du mieux après le récent creux de décembre. Selon nos prévisions, les ventes mondiales de véhicules augmenteront de 1,8 % en 2025 et de 1,7 % en 2026; les risques sont potentiellement plus pondérés pour une baisse, puisque les tarifs font souffler des vents contraires sur la croissance mondiale (graphique 4).

Graphique 3 : Les ventes mondiales de véhicules par région; Graphique 4 : Les contribution des régions à la croissance des ventes mondiales automobiles
Tableau 1 — Perspectives des ventes mondiales d'automobiles (Millions d'unités); Tableau 2 — Les perspectives des ventes d’automobiles dans les provinces (en milliers d’exemplaires par an)
Les perspectives trimestrielles du secteur de l’automobile en Amérique du Nord: Graphique 1 : Ventes de véhicules légers au Canada; Graphique 2: Ventes de véhicules légers au États-Unis; Graphique 3 : Les prévisions de la production automobile nord-américaine de Wards Automotive; Tableau 3 — Les perspectives annuelles de production en Amérique du Nord