Grâce à sa formation de SEAL suivie il y a près de 20 ans, Rich Diviney a bien compris comment créer des liens de confiance, un apprentissage qui a commencé le dernier jour de sa formation.

Les six mois de formation éreintante s’achevaient sur un entraînement en explosifs de cinq semaines sur l’île de San Clemente, au large de San Diego. Malgré sa petite taille, l’île comporte une colline haute et escarpée utilisée pour orchestrer la punition appelée course « en vol », où les futurs SEAL chargés de munitions et d’une plaque de métal de 30 kilos doivent gravir la colline le plus rapidement possible. Au dernier jour d’entraînement, on a donné l’ordre à la promotion sortante d’enchaîner les courses en vol jusqu’à ce que quelqu’un batte le record d’environ deux minutes.

« J’ignore quel genre de bruit j’ai fait à ce moment-là », relate Rich Diviney, se souvenant que l’instructeur lui avait demandé s’il avait un problème. Il avait alors été de s’opposer à l’activité, une initiative risquée en pleine formation de SEAL. « C’est une idée stupide. Les gars vont se blesser en essayant d’aller aussi vite. » À la surprise générale et au plaisir de tous, l’instructeur, pour des raisons inconnues, avait alors annulé l’activité et envoyé le groupe regarder des films. Dix-sept ans plus tard, Rich Diviney a croisé deux camarades de sa promotion avec lesquels il a évoqué cette journée-là. Les deux hommes ont affirmé qu’ils lui feraient confiance et le suivraient n’importe où, n’importe quand.

« Ces gars-là se sont souvenus de moi parce que j’ai fait ce qu’il fallait. J’ai fait preuve d’attention et de compassion. J’ai pris un risque pour eux, et ça les a marqués », dit-il.

Le commandant à la retraite des SEAL Rich Diviney a plus de 20 années de service et 13 déploiements outre-mer à son actif, dont en Iraq et en Afghanistan. Il était le conférencier invité par la Banque Scotia lors de son Forum sur le leadership d’avril. Durant sa présentation, il a évoqué certaines des leçons apprises en tant qu’officier responsable de la formation des SEAL pour les missions spéciales, et expliqué pourquoi plus on a confiance en soi et en son équipe, plus on obtient des résultats rapides.

À quoi ressemble une équipe hautement efficace? Selon Rich Diviney, une équipe peut prendre plusieurs formes, de la pyramide traditionnelle, où la hiérarchie est claire – il y a un chef, et ses subordonnés travaillent pour lui –, à la pyramide inversée, où le chef travaille pour ses subordonnés. Mais ni l’une ni l’autre ne correspond à la structure des SEAL, et c’est ce qui a permis à Rich Diviney de comprendre ce qu’est la hiérarchie dynamique ou le leadership permutable. Il s’agit d’être conscient que des défis, des situations stressantes ou des imprévus peuvent surgir à tout moment et, quand c’est le cas, c’est à la personne qui est touchée de plus près par le problème et la plus compétente de prendre les choses en main, sachant que ses collègues la suivront.


 

Photo: Rich Diviney, commandant à la retraite des SEAL de la Marine américaine

D’après Rich Diviney, les entreprises mettent beaucoup l’accent sur l’esprit d’initiative, et c’est indéniablement une qualité qu’on veut voir dans les équipes. Toutefois, l’initiative, c’est comme le vent qui souffle dans les voiles, tandis que la confiance représente plutôt tout le bateau. « Il faut d’abord bâtir le navire, qui, avec un peu de chance, il sera poussé par le vent favorable de l’initiative », dit-il en parlant de la hiérarchie dynamique, qui fonctionne seulement s’il y a une confiance absolue entre les membres.

« Parfois, dans une mission militaire, on laisse volontairement peu de place à l’initiative. Le chemin emprunté pour réussir, les actions posées en ce sens, tout repose sur la confiance. »

Selon lui, la confiance se compose de quatre éléments ou comportements, dont les deux premiers sont visibles et faciles à mesurer : les compétences (faire ce qu’il faut) et la régularité (faire souvent ce qu’il faut). Les deux autres sont moins tangibles : la personnalité ou l’intégrité (faire ce qu’il faut pour moi et pour le groupe) et la compassion (faire ce qu’il faut pour les autres parce qu’on se soucie d’eux en tant qu’êtres humains). « Dans le monde des affaires, on se focalise sur les comportements tangibles, sans tenir compte de la compassion et la personnalité. Mais il faut développer ces quatre éléments pour établir une confiance durable. »

Rich Diviney estime que les comportements ou les compétences, qui sont facilement mesurables, ne montrent pas toujours comment une personne va réagir en situation difficile, stressante ou imprévue. Ce sont plutôt les qualités personnelles, plus difficiles à évaluer, qui sont importantes pour établir la confiance : la patience, la connaissance de la situation, la faculté d’adaptation et l’empathie.

Les entreprises ont donc tout à gagner si leur processus de recrutement et de sélection prend en compte ces qualités. Pour mieux comprendre les comportements et les valeurs de son équipe, un leader doit d’abord connaître ses propres valeurs et qualités ainsi que les raisons qui le poussent à agir d’une manière ou d’une autre dans certaines situations. Ainsi, « nous apprenons tous à traiter les gens avec plus d’empathie », affirme Rich Diviney. Et c’est ainsi qu’on instaure la confiance et qu’on crée une hiérarchie dynamique.

Il a publié plus tôt cette année un ouvrage dans lequel il présente ces notions et bien d’autres. Ce livre s’intitule The Attributes: 25 Hidden Drivers of Optimal Performance.