• En octobre, les ventes mondiales d’automobiles ont enchaîné une troisième baisse mensuelle consécutive, en perdant ‑0,9 % sur un mois (en données désaisonnalisées). Les ventes ont plongé à 68,5 millions d’exemplaires en données désaisonnalisées et en rythme annualisé, ce qui est nettement inférieur aux 75 millions d’exemplaires en données désaisonnalisées et en rythme annualisé relevés dans la tendance en 2019 et ce qui porte à ‑1,4 % par rapport à 2021 le déficit depuis le début de l’année.
  • Les plus fortes baisses sont concentrées en Asie‑Pacifique (‑4,7 % sur un mois en données désaisonnalisées) et en Amérique du Sud (‑9,2 % sur un mois en données désaisonnalisées). En octobre, les ventes en Chine se sont repliées pour un troisième mois consécutif, en perdant ‑7,0 % sur un mois (en données désaisonnalisées). La contraction comptabilisée en Amérique du Sud est plus généralisée, menée par le Brésil (‑10,5 % sur un mois en données désaisonnalisées) et par le Pérou (‑11,9 % sur un mois en données désaisonnalisées).
  • En octobre en Amérique du Nord, les ventes ont augmenté de 9,7 % sur un mois (en données désaisonnalisées) grâce à l’amélioration des stocks. Toutefois, le chemin qui mène à la reprise s’annonce toujours aussi long.
  • La reconstitution des stocks demandera du temps, d’autant plus que l’expansion de la production est fortement entravée par les coûts élevés des intrants et par les pénuries de main‑d’œuvre. Si les fondamentaux restent solides en Amérique du Nord, surtout au Canada, les vents contraires qui soufflent sur la demande d’automobiles à court terme se multiplient. L’exposition à la hausse des taux d’intérêt, les pressions généralisées qui pèsent sur le coût de la vie de concert avec les prix toujours aussi élevés des véhicules dans un environnement dans lequel l’offre est tendue pèsent probablement sur le moral, du moins sur les achats majeurs. En raison de la forte incertitude qui règne sur les prochains trimestres — dont le risque d’une légère récession — malgré de solides bilans, les consommateurs pourraient décider d’attendre que la conjoncture économique revienne à la normale.
  • Nous restons fidèles à nos prévisions pour les ventes d’automobiles au Canada et aux États‑Unis : nos prévisions 2022 pour ces deux pays s’établissent respectivement à 1,5 million et à 13,6 millions d’exemplaires; les ventes sont essentiellement endiguées par l’offre. Nous nous attendons à ce qu’en 2023, le rythme des ventes au Canada et aux États‑Unis s’établisse respectivement à 1,65 million et à 14,8 millions d’exemplaires — ce qui est toujours inférieur à la demande fondamentale —, mais dans des fourchettes très vastes pour ces chiffres, compte tenu de l’incertitude économique (et des politiques d’intérêt public), en plus des faibles lignes de mire sur les plans de production automobile.
  • Nous nous attendons toujours à ce que les ventes mondiales de 2022 restent anémiques par rapport à 2021 et à ce qu’elles augmentent légèrement, de l’ordre de 4,5 %, en 2023.

LA LÉTHARGIE DES DONNÉES DE SYNTHÈSE MASQUE LES DIFFÉRENCES RÉGIONALES

En octobre, les ventes mondiales d’automobiles ont inscrit une autre baisse sur un mois, dans la foulée d’un recul comparable en septembre, toujours en raison d’une décélération en Asie‑Pacifique (‑4,7 % sur un mois en données désaisonnalisées) et en Amérique du Sud (‑9,2 % sur un mois en données désaisonnalisées). En Chine, les ventes d’automobiles se sont à nouveau contractées de ‑7,0 % sur un mois (en données désaisonnalisées) en octobre, en raison de l’impact tenace du confinement — en enchaînant une troisième baisse mensuelle consécutive. Or, elles ont quand même augmenté de 11,2 % par rapport à il y a un an. Après avoir connu une série de ralentissements dans le deuxième semestre de 2022, les ventes d’automobiles en Amérique du Sud ont plongé, dans l’ensemble, en octobre : le Brésil et le Pérou ont mené cette baisse. En octobre en Europe de l’Ouest, la reprise des ventes a aussi perdu de son élan et a inscrit une baisse de ‑0,3 % sur un mois (en données désaisonnalisées). Sur le marché le plus important — l’Allemagne —, les ventes ont influé sur les chiffres de synthèse, en se repliant de ‑4,9 % sur un mois; elles ont baissé dans bien d’autres pays (dont la France, à ‑7,7 % sur un mois, et l’Espagne, à ‑5,3 % sur un mois). Au Royaume-Uni, le solide rebond (23,2 % sur un mois, en données désaisonnalisées) masque la majorité des pertes dans la région. 

Graphique 1 : Les ventes mondiales de véhicules par région

À la différence de la léthargie des chiffres de synthèse, les ventes nord‑américaines ont clairement télégraphié un revirement en octobre : les ventes ont bondi de 9,7 %, en misant sur le gain de 1,7 % dans le mois précédent. Les États‑Unis ont mené cette amélioration tendancielle grâce à une hausse de 10,1 % des ventes sur un mois (en données désaisonnalisées). Le Canada a comptabilisé son premier gain après avoir enchaîné cinq baisses mensuelles consécutives, en inscrivant une croissance dans les deux chiffres de 12,9 % sur un mois (en données désaisonnalisées).

Les ventes d’octobre sont appelées à rester vigoureuses grâce à l’amélioration des stocks — ce qui cadre avec nos attentes, puisque nous prévoyons une reprise graduelle d’ici la fin de l’année. Nous restons fidèles à notre pronostic pour les ventes d’automobiles au Canada et aux États‑Unis : nos prévisions 2022 pour ces deux pays s’établissent respectivement à 1,5 million et à 13,6 millions d’exemplaires. Nous pensons que les ventes d’automobiles continueront de gagner plus de 8 % en 2023 dans ces deux pays à l’heure où l’offre s’améliore, mais dans des fourchettes très vastes pour ces chiffres en raison de l’incertitude économique (et les politiques d’intérêt public), ainsi que des faibles lignes de mire sur les plans de production automobile.

LE LENT RÉÉQUILIBRAGE DE L’OFFRE ET DE LA DEMANDE EN AMÉRIQUE DU NORD

Après que les stocks limités aient pesé sur les ventes pour la plus grande partie de l’année, les marchés nord‑américains donnent depuis quelques mois des signes précoces d’un allégement des contraintes de l’offre. En octobre, les niveaux de stocks aux États‑Unis se sont inscrits à 51 % de plus que dans le même mois l’an dernier, et l’offre en jours de véhicules légers a culminé depuis mai 2021 (graphique 2). S’ils ont laissé poindre une certaine amélioration, les niveaux de stocks sont restés faibles selon les normes statistiques, surtout pour certaines marques non luxueuses de l’Asie et pour les marques de luxe japonaises et européennes, d’après Cox Automotive. Le rythme de la reprise des stocks n’est pas assez rapide pour ramener à la normale le ratio des stocks par rapport aux ventes, qui a atteint son plus creux, sans pour autant donner de signe palpable d’un revirement. Au Canada, les données exclusives permettent aussi de croire que les stocks se sont légèrement relevés par rapport à il y a un an; or, la conjoncture du marché reste toujours aussi tendue qu’elle l’est aux États‑Unis, voire plus.

Graphique 2 : Les stocks de véhicules légers aux États-Unis

Dans la colonne de la demande, les facteurs restent solides sur fond de hausse des taux d’intérêt, surtout au Canada. Au T3, le PIB canadien a étonné à la hausse et a inscrit un solide taux de croissance de 2,9 % sur un trimestre, en repoussant à la fin de l’année ou au début de l’an prochain les ralentissements attendus. Le taux d’épargne des ménages s’est hissé à 5,7 % au T3, ce qui est nettement supérieur à la moyenne prépandémique de 3 %-4 %. Le revenu primaire des ménages a gagné 8,7 % depuis le même trimestre l’an dernier grâce à la forte hausse des salaires. L’essor de l’immigration pourrait muscler assez fortement la demande de véhicules à terme : le Canada est en bonne voie de dépasser la fourchette supérieure de sa cible d’immigration 2022 de 445 000 personnes, ce qui représente une augmentation de près de 10 % par rapport à l’immigration sans précédent de l’an dernier. Le gouvernement du Canada a également haussé ses cibles d’immigration pour les deux prochaines années (graphique 3) : il prévoit d’accueillir 447 000 nouveaux résidents permanents en 2023 et 451 000 en 2024. 

Graphique 3 : L'immigration proposée pour le Canada

Si les frais de propriété des voitures reviennent plus chers, les salaires viennent compenser l’écart. Aux États‑Unis, l’inflation des véhicules neufs s’est établie à 8,4 % sur un an en octobre, après avoir culminé à plus de 13 % en avril (graphique 4). JD Power a fait état de mensualités moyennes financées de 712 $ en novembre, soit 7,2 % de plus qu’il y a un an. Au rythme auquel se ralentit la croissance des prix des véhicules neufs, l’augmentation des salaires reste stable, au rythme annualisé de 4 % sur un mois en octobre, ce qui porte les gains horaires moyens à 4,7 % de plus que dans le même mois l’an dernier. Au Canada, l’inflation des véhicules neufs s’est maintenue à un niveau comparable à celui des États‑Unis, à 7,9 % sur un an; or, les salaires augmentent plus rapidement, au rythme annualisé de 8,8 % sur un mois en octobre, ce qui représente 5,5 % de plus qu’il y a un an (graphique 5). 

Graphique 4 : L'inflation des véhicules neufs et la croissance des salaires; Graphique 5:  Canada : L'inflation des véhicules neufs et la croissance des salaires

Toutefois, à court terme, les vents contraires qui soufflent sur la demande d’automobiles se multiplient. Dans nos plus récentes prévisions, nous pensons que les banques centrales hausseront encore leurs taux directeurs au début de 2023, en raison des pressions inflationnistes chroniques. Il faut probablement s’attendre à une légère récession dans le premier semestre de 2023, ainsi qu’à un certain relèvement du chômage; toutefois, les mesures qu’adopteront les décideurs dans les prochaines semaines joueront un rôle déterminant, ce qui permettra de confirmer ce scénario de base. À l’heure où les taux d’intérêt sont toujours appelés à augmenter au Canada et aux États‑Unis, les pressions généralisées sur le coût de la vie, de concert avec les incertitudes qui règnent sur les marchés financiers, pèseront probablement sur le moral et entraveront les achats en cours de route. Or, jusqu’à maintenant, ces incidences ont été masquées par les stocks limités.

Il faudra compter du temps avant que les stocks se reconstituent dans un environnement dans lequel la demande est toujours aussi solide, malgré l’amélioration tendancielle de la production. En octobre, la production nord‑américaine accuse toujours une baisse de ‑13,5 % depuis le début par rapport à 2019. Wards Automotive prévoit que d’ici la fin de l’année, la production de véhicules légers augmentera de 11 % (1,4 million d’exemplaires) par rapport à 2021 et gagnera encore 7 % (1,1 million d’exemplaires) en 2023. Les véhicules produits sur le marché intérieur représentent essentiellement 78 % des ventes nord‑américaines, et en raison de la baisse moyenne des ventes de près de trois millions d’exemplaires par an depuis le début de la pandémie, la reprise attendue ne permettra pas de reprendre le terrain perdu du point de vue des ventes sans une augmentation de la capacité de production. À l’heure actuelle, puisque la production est fortement entravée par les coûts élevés des intrants et par les tensions sur les marchés du travail, nous ne nous attendons pas à ce que l’équilibre entre l’offre et la demande soit pleinement rétabli sur les marchés en 2023.

Tableau 1 — Perspectives des ventes mondiales d'automobiles (Millions d'unités); Tableau 2 — Les perspectives des ventes d’automobiles dans les provinces (en milliers d’exemplaires par an)
Les perspectives trimestrielles du secteur de l’automobile en Amérique du Nord: Graphique 1 : Ventes de véhicules légers au Canada; Graphique 2: Ventes de véhicules légers au États-Unis; Graphique 3 : Les prévisions de la production automobile nord-américaine de Wards Automotive; Tableau 3 — Les perspectives annuelles de production en Amérique du Nord