Robert Walker

En 1969, j’ai obtenu mon diplôme de l’Université Sir George Williams à Montréal, où j’étudiais les beaux-arts et la peinture en particulier. Au cours de cette période, les peintres Color-Field de New York étaient en vogue et je travaillais dans un mode d’abstraction géométrique.

En 1975, le photographe de rue américain Lee Friedlander vint à Montréal pour donner un atelier et, par curiosité, je décidai d’y participer. Je fus immédiatement conquis par la virtuosité de sa technique et par l’unicité de sa vision. Il donnait des projets photographiques au groupe et il revenait quelques semaines plus tard pour donner ses critiques. Il me complimenta sur mon travail, ce qui m’incita à considérer la photographie directe plus sérieusement. À ce moment, je sentais que la syntaxe et le vocabulaire de la photographie en noir et blanc s’épuisaient rapidement et je décidai donc de passer à la photographie en couleur qui, à cette époque, était encore considérée comme une nouveauté.

En 1978, je reçu une bourse du Conseil du Canada pour continuer à explorer les possibilités du médium. Mon objectif était de produire des photographies en couleurs qui allaient au-delà du seul documentaire en maintenant un équilibre formel entre la forme et le contenu, tout en contenant en même temps un mystérieux élément poétique. Je décidai donc de m’installer à New York pour faire partie d’un environnement plus stimulant sur le plan visuel. En 1984, la maison Oxford University Press publia mon premier livre, New York Inside Out, avec une preface de William S. Burroughs. En 1980, j’eus l’occasion unique de photographier en coulisses les préparatifs du film de John Huston, Annie. J’obtins une commande, ainsi que William Eggleston, Gary Winogrand, Stephen Shorem et Joel Meyerowitz, pour produire une série de photographies destinées à un livre, publié par Abbeville Press et dont le titre était Annie on Camera.

Vers la fin des années 1980, j’élargis mes horizons et j’allai photographier Varsovie, Paris, Rome, Rio de Janeiro, Las Vegas, ainsi que Montréal et Toronto. Thames & Hudson publièrent mon oeuvre de cette période, dans un livre intitulé Colour is Power, avec une introduction de Max Kozloff. Ce livre servit de catalogue pour une exposition éponyme qui qui fut présentée dans des musées en Hollande, en Belgique, en France, en Suisse, en Pologne et en Allemagne. La revue American Photographer et le quotidien The Globe & Mail jugèrent que ce livre était un des meilleurs livres de photographies de l’année. La Magazine Association me décerna la médaille d’argent pour le meilleur portefeuille publié dans une revue d’art canadienne, Border Crossings en 2002.

Il y a plusieurs années, je sentis que je devais changer complètement de sujet et je décidai de me tourner vers la nature. Je visitai donc tous les jours des jardins botaniques, pour y photographier, les fleurs, les arbres et les arbustes. J’utilisais les mêmes stratégies de composition que pour mes photos urbaines. J’essayais d’ignorer le sujet littéral et de réduire les éléments visuels à la couleur pure et à la forme abstraite.

En 2012, je fus invité à participer à l’exposition Cartier-Bresson: A Question of Colour. Cet événement était particulièrement important pour moi parce qu’il examinait la relation de l’esthétique du concept de «l’instant décisif» de Cartier-Bresson et son influence sur la photographie en couleurs. Helen Levitt, Ernst Haas, Saul Leiter, Joel Meyerowitz, Alex Webb, Fred Herzog et d’autres pionniers des débuts de la photographie de rue en couleurs faisaient aussi partie de cette exposition.