- Le baromètre le plus élémentaire de l’inflation fondamentale continue de se ralentir.
- Il a atteint son plus creux depuis presque un an.
- Et il télégraphie peut-être un point d’inflexion. Un optimisme prudent est de mise.
- IPC du Canada : évolution en % sur un mois en chiffres non désaisonnalisés//évolution en % sur un an, octobre :
- Données réelles : 0,7/6,9
- Scotia : 1,2/7,4
- Consensus : 0,8/6,9
- Auparavant : 0,1/6,9
- IPC « de base » moyen sauf comm. : 5,1 % sur un an (5 % auparavant)
L’ensemble des chiffres inflationnistes qui retient l’attention peut donner lieu à des divergences d’opinions sur ce que veulent dire ces chiffres pour les marchés et pour la politique monétaire. Or, le premier baromètre qui est le plus révélateur à mon avis continue de télégraphier provisoirement des pressions désinflationnistes à la marge. Je reviendrai sur cet indicateur plus loin après avoir mis en lumière ses incidences pour la BdC.
LA HUITIÈME MANCHE POUR LES HAUSSES DE TAUX
De concert avec le fait que le gouverneur Tiff Macklem a décidé de minorer la hausse des salaires — du moins pour l’instant —, le résultat pourrait se solder par une nouvelle rétrogradation du rythme des hausses de taux à la réunion de décembre et à des prévisions plus prudentes sur une prochaine pause. Il y a toujours de lourdes incertitudes qui pèsent sur le portrait de l’inflation en 2023, par exemple la nécessité de se pencher sur les questions de capacité excédentaire dans l’économie et le marché du travail alors qu’on ne dispose guère de données justificatives réelles de cette détente jusqu’à maintenant, afin de ramener durablement l’inflation sur la cible. Il y a aussi le risque que si la léthargie de 2023 se révèle transitoire et légère, ce que semble penser la BdC, elle court alors le risque de déclarer prématurément victoire. Pour l’instant toutefois, il est probable que la BdC sera encore encouragée par les statistiques.
D’autres facteurs viennent éclairer ce point de vue dans ce qui constitue probablement la huitième manche pour le durcissement monétaire à court terme. La BdC renonce de plus en plus à un durcissement rapide en territoire restrictif pour privilégier une approche plus mesurée dans les effets décalés des changements cumulatifs depuis le début de l’année, de concert avec la contraction rapide de son bilan. Sa fonction réactive est aussi plus embrouillée compte tenu des changements apportés à sa nouvelle entente sur les cibles inflationnistes avec le gouvernement fédéral en décembre dernier : d’après cette entente, la cible inflationniste reste fixée à 2 %; or, le tableau est nuancé dans le libellé embrouillé sur le niveau d’emploi durable maximal. Comme je l’ai écrit dans Global Week Ahead, je crois qu’on peut penser que l’information nouvelle reproduite dans la déclaration de Tiff Macklem veut dire qu’on a la volonté de hausser l’inflation dans la moitié supérieure de la fourchette cible souple de 1 %-3 %, si en l’abaissant, le marché de l’emploi faiblissait. Les inquiétudes qui ont culminé à propos de la léthargie de la monnaie et de ses incidences inflationnistes potentielles se sont aussi apaisées dans le dernier mois, puisque le dollar CA s’est apprécié de 5 ou 6 cents, en partie grâce aux fortes variations du dollar US.
IL FAUT TRIER SUR LE VOLET LES BAROMÈTRES DE L’INFLATION « FONDAMENTALE »
L’IPC de base traditionnel hors produits alimentaires et énergie, qui a gagné seulement 0,2 % sur un mois en chiffres désaisonnalisés, indique le mieux la léthargie relative des pressions sous-jacentes sur les prix. Il s’agit du chiffre le plus modéré depuis novembre 2021. Le rythme annualisé de 2,5 % sur un mois de l’inflation en données désaisonnalisées et en rythme annualisé se convertit et devient 3,7 % en moyenne mobile sur trois mois, ce qui n’est pas vraiment une tendance au ralenti, mais ce qui permet de dire que le ralentissement se poursuit depuis mai. C’est ce qu’indique le graphique 1. La mise en garde habituelle s’impose : il faut plus de données. Or, nous sommes sur la bonne voie, et tout porte de plus en plus à croire que c’est ce qui se produit maintenant puisqu’à tout autre point depuis un certain temps.
Cette interprétation est peut-être différente par rapport à ce qui constitue probablement des baromètres inférieurs de l’inflation fondamentale. La moyenne des deux chiffres inflationnistes de la tendance centrale — la médiane pondérée et la moyenne tronquée — s’est hissée à 5,1 % sur un an contre 5,0 %, ce qui pourrait être interprété comme une pression soutenue sur l’inflation fondamentale (graphique 2). Il n’empêche que ce chiffre est enlisé à 5,0 %-5,2 % sur un an depuis mai.
L’ennui, avec ces derniers baromètres, c’est qu’ils évoluent trop lentement, puisqu’ils sont le fruit d’approches différentes dans le suivi des pressions tendancielles centrales sur les prix en chiffres composés mensuellement par rapport à l’année écoulée. Il ne s’agit pas de calculs ponctuels sur un an; or, puisqu’ils ont baissé dans le mois précédent et qu’ils constituent un acquis dans le mois le plus récent dans un ensemble mobile de calculs qui tiennent compte des estimations révisées en cours de route sur toute une année de données, ils n’apportent jamais le même degré d’information à un point d’inflexion potentiel des pressions inflationnistes au même titre qu’un baromètre plus pur et plus simple sur un mois, hors prix des aliments et de l’énergie. Il s’agit d’une lacune majeure dans les baromètres trop compliqués qu’a déployés la BdC il y a plusieurs années.
LES FACTEURS ET LES DÉTAILS
L’inflation de synthèse s’est établie à 0,7 % sur un mois en chiffres non désaisonnalisés, et le rythme sur un an s’est maintenu à 6,9 %. Les prix désaisonnalisés ont monté de 0,6 % sur un mois. En apparence, on dirait que de nouvelles pressions sur les prix sont imminentes.
Là où le bât blesse, c’est dans le manque d’envergure. En enlevant les aliments et l’énergie, les prix n’ont guère bougé (0,2 % sur un mois en chiffres désaisonnalisés). La hausse de 9,2 % de l’essence sur un mois en chiffres non désaisonnalisés (9,5 % en chiffres désaisonnalisés) est venue ajouter environ 0,4 point de pourcentage aux pressions sur les prix sur un mois, ce qui cadre avec mon pistage. Le poids des aliments, à 16 %, est venu ajouter un généreux 0,1 point de pourcentage aux prix sur un mois en chiffres désaisonnalisés.
Le graphique 3 indique que l’inflation des prix des services a considérablement décru par rapport aux mois précédents en chiffres non désaisonnalisés sur un mois. L’inflation des prix des biens s’est accélérée; or, sauf les aliments et l’énergie, elle s’est ralentie par rapport aux pics précédents.
L’inflation des prix des logements décroît elle aussi (graphique 4). Le Canada capte le logement en faisant appel à des méthodes très différentes de celles des États‑Unis, en utilisant le volet du logement seulement du nouvel indice des prix des logements comme facteur pour la valeur à neuf dans les frais de logement. La valeur à neuf a plongé de 0,1 % sur un mois en chiffres désaisonnalisés. Il s’agit d’un poids nettement moindre que le chiffre de l’inflation du logement capté par les États‑Unis, qui font appel à une méthode différente, fondée sur les loyers équivalents des propriétaires.
L’inflation des prix dans les restaurants reste élevée (graphique 5).
L’inflation des prix du transport en avion s’est brusquement repliée pour se rapprocher davantage des normes saisonnières (graphique 6).
Le graphique 7 fait état des variations sur un mois des prix en chiffres non désaisonnalisés dans l’ensemble du panier, et le graphique 8 fait de même, en pondérant la contribution des constituantes selon l’inflation. Les graphiques 9 et 10 en font autant, en chiffres sur un an.
Nous invitons aussi le lecteur à consulter le tableau d’accompagnement, qui donne une répartition plus détaillée des constituantes, ainsi que les micrographiques et les indicateurs de la « note z » des écarts par rapport aux tendances antérieures sur plusieurs années.
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