• La politique n’a pas bougé, comme prévu.
  • Les dissidents sont revenus à la charge.
  • Le quart environ des membres du FOMC s’attend à une première hausse de taux en 2023.
  • Des révisions positives ont été apportées aux prévisions de croissance et d’inflation.
  • La déclaration codifie les objectifs à plus long terme.

Si la rentrée scolaire qui se déroule dans de nombreuses régions vous fait déjà paraître bien loin la fin de l’automne, il semble que le FOMC soit sur la même longueur d’onde. Si tous les instruments de la politique monétaire n’ont pas bougé, comme escompté, le consensus étanche qui s’était fait jour les 27 et 28 août, lorsque le président Powell a publié la Déclaration révisée sur les objectifs à plus long terme et sur la Stratégie de la politique monétaire au symposium annuel de Jackson Hole, a un peu fuité aujourd’hui. Ce consensus, bien qu’il soit toujours généralement valable, l’est devenu un peu moins.

Les titres boursiers ont cédé du terrain quand la poussière est retombée dans la foulée de la déclaration et de la conférence de presse, qui ont duré un peu plus d’une heure. Le S&P 500 a d’abord gagné 0,5 % après la déclaration, pour ensuite finir en baisse de 0,5 %. Le dollar US s’est un peu valorisé d’après l’indice DXY. Le rendement des bons du Trésor américain à 10 ans a monté de 2,5 points de base. On ne sait pas vraiment si cette hausse est entièrement attribuable à la réaction aux déclarations de la Fed, puisque le secteur de la technologie de l’information a commencé à flancher au début de la conférence de presse, pour faire plonger le S&P.

Plusieurs facteurs expliquent qu’il y a eu un peu moins de cohésion à la marge, ce qui, avec d’autres changements, a fait planer plus d’incertitude sur les engagements de la Fed.

a) Les dissidents sont revenus à la charge : Il n’y a pas eu de vote de dissidence au sein du FOMC depuis la réunion du 15 mars, quand Loretta Mester a préféré la baisse de 50 points de base, au lieu d’un point de pourcentage complet. Cette fois, il y a eu deux dissidents. Neel Kashkari s’est opposé parce qu’il semble préférer rester sur la touche jusqu’à ce qu’on atteigne durablement la cible inflationniste de 2 %, au lieu d’adopter un libellé qui laisse entendre que l’on surcible modérément l’inflation depuis un certain temps. Le président de la Fed de Dallas, Robert Kaplan, a lui aussi été dissident parce qu’il souhaite avoir une plus grande marge de manœuvre dans la fixation des taux directeurs au-delà du point auquel les objectifs énoncés dans la nouvelle déclaration sur la stratégie du taux directeur ont été atteints. Leurs premières interventions dans la foulée du communiqué d’aujourd’hui pourraient apporter d’autres précisions, notamment l’intervention d’Eric Rosengren le 23 septembre.

b) Les pointillés : Le tracé en pointillés révisé (graphique 1) fait état d’un accord unanime soutenu pour ne pas faire bouger les taux cette année ni l’année suivante et indique qu’on est un peu plus d’accord pour ne pas changer les taux en 2022, puisque désormais, un seul prévoit une hausse de taux en 2022, au lieu des deux qui le prévoyaient dans les projections de juin. L’insertion des prévisions de 2023 pour la première fois nous apprend que quatre des 17 membres du FOMC prévoient des hausses, soit à peu près le quart des membres du comité, ce qui n’est pas sans conséquence. Voilà pour ceux qui se disaient que « nous ne pensons même pas à monter les taux », du moins dans le for intérieur des participants. La projection des taux à long terme et la dispersion de cette projection n’ont pas bougé.

 

c) Les révisions des prévisions : On a révisé à la hausse chacune des projections de croissance et d’inflation, comme l’indique le tableau de synthèse complémentaire. Le rythme de la contraction de cette année a été tenu en laisse, et le président Powell a reconnu, durant la conférence de presse, que la reprise se déroulait plus rapidement que prévu jusqu’à maintenant.

 

d) Les changements dans le libellé de la déclaration : Il n’était pas certain que la Fed codifie les changements dans ses objectifs à plus long terme dans la déclaration d’aujourd’hui; or, il était probable qu’elle le fasse, et c’est ce qu’elle a effectivement fait. La déclaration évoque ouvertement l’objectif de porter l’inflation « modérément au-dessus de la barre des 2 % pendant un certain temps pour que l’inflation atteigne une moyenne de 2 % à la longue et que les attentes inflationnistes à plus long terme restent bien ancrées à 2 % ».

e) Les prévisions du programme de rachats : La déclaration même aurait pu être plus ambitieuse sur les motifs du rachat des bons du Trésor et des titres adossés à des créances hypothécaires. Il n’en est rien. Il s’agit toujours essentiellement de soutenir l’harmonie des rouages du marché et d’aider à promouvoir une conjoncture financière conciliante. Dans sa conférence de presse, M. Powell a quand même effectivement relevé que les rachats de 120 G$, constitués de bons du Trésor (80 G$ US) et de titres adossés à des créances hypothécaires (40 G$ US) par mois, sont portés par des motifs plus vastes que le redressement du marché.

Il n’empêche que puisqu’il reste à peine moins de sept semaines avant la présidentielle, il se pourrait qu’il soit difficile d’évaluer intégralement les communiqués du FOMC, notamment en ce qui concerne l’ouverture qui viendra infléchir la politique dans un sens ou un autre. L’histoire nous apprend généralement que — sauf circonstances impérieuses —, la Fed s’abstient d’intervenir à une date aussi rapprochée d’une élection, et encore moins celle-ci! La Fed ne fera sa prochaine déclaration qu’après l’élection du 5 novembre, et même cette déclaration pourrait être discrète d’ici à ce qu’un certain délai s’écoule.

La Fed a livré d’autres messages essentiels, notamment en faisant observer que malgré les progrès accomplis dans une reprise plus vive qu’attendu, il y a encore énormément de capacité de rechange et que la moitié de tous les travailleurs qui ont perdu leur poste de salarié est toujours au chômage. M. Powell a fait observer que les ménages ont rattrapé les trois quarts des dépenses qu’ils n’avaient pas faites, que le logement a regagné son niveau du début de l’année et qu’il y a des signes de progrès dans l’investissement des entreprises. Il a répété que le virus reste une incertitude dominante et a été plutôt direct en réclamant d’autres mesures de relance budgétaires, en esquivant les questions à propos de leur composition optimale, qu’il est préférable de laisser à la discrétion du Congrès. M. Powell, qui a fait observer que la Fed n’est pas à court de munitions, a quand même répété que la politique monétaire comporte des limites, par exemple le pouvoir de prêter mais non de subventionner, et que la politique budgétaire pourrait être plus efficace.

QUESTIONS COMPLÉMENTAIRES

Plusieurs lignes d’interrogation complémentaires dans la conférence de presse pourraient être plus utiles.

Quand on lui a posé la question sur ses inquiétudes dans la stabilité financière, M. Powell a noté que ces inquiétudes perdurent depuis la dernière crise financière mais qu’elles ne se sont jamais vraiment matérialisées, que la Fed est attentive, mais que la politique monétaire n’est pas le premier rempart par rapport aux règlements d’application, à l’encadrement, aux épreuves de résistance, aux besoins énormes en capitaux et en liquidités et aux outils macroéconomiques.

Nous avons cru qu’une meilleure question consistait à savoir si le FOMC était vraiment qu’il était en mesure de structurer une hausse de l’inflation alors que ses prévisions de base sur les DCM atteignent à peine 2 %, même d’ici 2023, sans jamais franchir ce seuil. M. Powell a été en quelque sorte évasif en affirmant qu’il faudra un certain temps avant de franchir le seuil des 2 %. Il va de soi que les lecteurs logiques ne demanderont pas vraiment à qui que ce soit de s’en tenir à des prévisions macroéconomiques sur un aussi long terme; c’est pourquoi nous allons traverser ce pont lorsque nous serons à la rivière. Toujours est-il que les marchés l’intègrent dans les cours, pour tenir compte essentiellement des résultats dans ce cas, et qu’il n’y a guère d’inflation ni de hausse pour les années à venir; soyons optimistes.

M. Powell a laissé entendre que les membres du FOMC tiennent probablement compte des attentes vis-à-vis des mesures de relance budgétaires dans les prévisions de leur comité, puisqu’il a déclaré que l’impuissance à s’entendre sur un autre programme de relance serait « certainement un risque baissier » et que les différents membres du FOMC ont fait ce qu’ils jugeaient opportun. Ce qu’il faut en comprendre : les prochaines prévisions de décembre pourraient abaisser les attentes si on ne s’entend pas sur ce programme.

Quand on lui a posé la question sur l’intégration des considérations se rapportant à l’inégalité des revenus et à l’abordabilité des logements dans les activités de la Fed, M. Powell a répondu que la Fed mène constamment des recherches sur ces questions et sur leur incidence dans la reprise, mais que la politique monétaire « ne permet pas de se pencher sur ces questions grâce à nos outils. Nos outils sont vastes et ne permettent pas de cibler des groupes précis ».

J’ai aimé la réponse de M. Powell à la question qui lui a été posée sur ce qu’il adviendra de l’économie s’il n’y a pas de vaccin avant 2021 (ou plus tard). Il a fait observer que la distanciation sociale, le port du masque et les dépistages bon marché et rapides, entre autres, pourraient toujours permettre de déconfiner des secteurs de l’activité économique et à une grande partie de la population active de retourner au travail dans l’ensemble du pays.

M. Powell a refusé de débattre d’une question à propos des épreuves de résistance, en affirmant qu’il n’avait rien à proposer aujourd’hui.

On lui a demandé ce qui n’allait pas dans la conception ou le fonctionnement du Programme de prêts aux moyennes entreprises, compte tenu de la taille anodine de ce programme. Il a apporté à la question une réponse qui comporte différents volets :

  • les entreprises n’indiquent pas que les contraintes de crédit sont le principal problème; on a donc peut-être exagéré son utilité;
  • certains établissements de crédit s’inquiètent des attentes vis-à-vis de la participation à ce programme et estiment qu’il faudrait consentir les prêts comme on le ferait pour d’autres prêts;
  • il s’agit d’un programme destiné aux entreprises qui n’ont pas accès à d’autres moyens de crédit, et par ailleurs, pourquoi en auraient-elles besoin? De nombreuses entreprises ont des solutions de rechange;
  •  nombreuses sont les entreprises qui sont toujours confinées et qui ne peuvent pas rembourser de prêts; elles ont donc plutôt besoin d’une aide budgétaire;
  • M. Powell n’a pas souhaité commenter les allégations voulant que le Trésor demande aux banques d’éviter à tout prix toute perte dans les programmes de prêts aux moyennes entreprises, alors que le président de la Fed de Boston, Eric Rosengren, a déclaré que la décision reviendrait au Congrès.

Quand on lui a posé une question à propos de l’aide destinée à l’immobilier commercial, M. Powell a noté à juste titre que les pouvoirs de la Fed ne sont qu’indirects. La Fed ne peut pas cibler directement certains secteurs; or, ces programmes visent les titres de l’immobilier commercial, et le programme destiné aux moyennes entreprises permet à ces dernières de payer leurs loyers, alors que les écarts sur les titres adossés à des créances hypothécaires se sont rapprochés. Il a en outre fait observer que les conditions interdisent souvent de s’endetter encore plus, ce qui est un obstacle quand il s’agit d’apporter une aide plus directe.

Nous vous invitons à consulter la comparaison des déclarations ci-jointes. Vous pouvez prendre connaissance des déclarations d’origine en cliquant sur ce lien et des prévisions originelles en cliquant sur cet autre lien

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